« Il n’y aura pas de panier anti-inflation », avait pronostiqué la présidente de la FNSEA Christiane Lambert, interrogée par France TV Info le 4 mars 2023 avant la clôture du Salon de l’agriculture et celle des négociations commerciales. « La FNSEA y est opposée parce qu’il reviendrait à casser les prix en s’adressant à tout le monde. » Et ses prévisions étaient bonnes : lors d’une rencontre avec la grande distribution le 6 mars 2023 à Paris, Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, a admis qu’il envisageait plutôt un autre dispositif.
Pas de panier anti-inflation
Le panier anti-inflation devait être initialement mis en place à la mi-mars pour un délai de trois mois. Il était composé d’une cinquantaine de produits alimentaires et non alimentaires à prix non pas cassés mais modestes et, surtout, stables. Au fur et à mesure de son élaboration, les oppositions s’alignaient devant ce projet. La grande distribution préférait garder la main sur ses prix et multipliait elle-même ses propres tickets anti-inflation. La FNSEA lui reprochait la généralisation du prix cassé.
« Confier la gestion de l’aide alimentaire à la grande distribution est tout sauf une bonne idée », avaient écrit la FNSEA et Jeunes Agriculteurs en lisant le 15 janvier 2023 les premières lignes sur le bouclier anti-inflation écrites dans Le Parisien.
Un trimestre anti-inflation
Pour autant, le gouvernement tente de se montrer encore à la manœuvre. L’inflation alimentaire est évaluée à 14,5 % en un an en février par l’Insee. Bruno Le Maire annonce donc le 6 mars 2023 un « trimestre anti-inflation ». En clair, il s’agit d’une opération commerciale qui vise à offrir jusqu’en juin « le prix le plus bas possible » sur une large sélection de produits laissée au choix des distributeurs. Il en coûtera « plusieurs centaines de millions d’euros » au secteur, selon Bruno Le Maire. Pour financer le « trimestre anti-inflation », les enseignes puiseront dans leurs marges.
Bruno Le Maire a assuré lundi que les services de son ministère, notamment la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), effectueraient des contrôles en magasins pour s’assurer que les distributeurs ne feront pas peser l’opération sur leurs fournisseurs agro-industriels ou agricoles. Les produits concernés seront identifiables grâce à un logo tricolore « trimestre anti-inflation ». Et l’essentiel des opérations commerciales portera sur les produits de marque distributeur, c’est-à-dire ceux qui comme Reflets de France, Marque Repère, Marque U sont la propriété des enseignes et n’entrent pas dans le cadre des négociations annuelles avec les industriels.
En échange de cet accord, les distributeurs ont obtenu de Bercy qu’à l’issue de ce « trimestre anti-inflation », les négociations commerciales avec les fournisseurs de l’agro-industrie, qui se sont achevées le 1er mars 2023, soient relancées.
Renaissance du chèque alimentaire
Le même jour, le gouvernement ressort l’idée du chèque alimentaire. Ce projet consiste à réserver un crédit aux plus démunis pour leurs achats d’aliment en accordant une bonne place aux associations caritatives et aux épiceries solidaires. Cette idée faisait partie des propositions du débat citoyen préalable à la loi "Climat et résilience" de 2021, mais n’avait pas été reprise dans le projet de loi. Elle était revenue dans le programme électoral d’Emmanuel Macron en mars 2022. Un temps réanimée à l’été 2022, elle avait finalement été absente du projet de loi de finances pour 2023 pour laisser la place au panier anti-inflation, lui-même jeté aux oubliettes désormais.
Toujours le lundi 6 mars 2023, Bruno Le Maire a annoncé que les ministres de l’Agriculture, Marc Fesneau, et des Solidarités, Jean-Christophe Combe, lanceraient une expérimentation dans les tout prochains mois. L’expérimentation « se fera sur une base territoriale, sans doute le département, de façon à être au plus près des consommateurs et au plus près des producteurs agricoles », a-t-il ajouté, sans toutefois apporter plus de précision.