«Nous nous appliquons à étudier au cas par cas les dossiers d’installation pour lesquels nous sommes sollicités », explique Delphine Boubert, du Crédit agricole Brie Picardie. Les banques ont une approche économique des dossiers, grâce au plan de financement, mais elles insistent beaucoup sur l’approche humaine. « Le but est de cerner si le candidat est prêt à se lancer, et de comprendre les raisons qui l’ont poussé à faire ce choix. Son projet doit lui permettre de s’épanouir et de préserver un équilibre entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle. »

Parcours et expériences

« Nous consacrons une attention particulière au parcours du jeune et à ses expériences professionnelles. Les installations dans un cadre familial sont les plus courantes dans notre département. Nous nous assurons que le projet est celui du jeune et non de ses parents, explique Christelle René, analyste au Crédit agricole des Côtes-d’Armor. D’autant plus que « les installations qui échouent sont souvent celles qui ont été réalisées sur une exploitation familiale. La communication est parfois complexe et le nouvel installé peut rencontrer des difficultés à trouver sa place », précise Sébastien Lecomte, du Crédit mutuel Maine-Anjou Basse-Normandie.

La tête sur les épaules

Pour Christelle René, « peu importe son profil et son âge, le candidat doit avoir la tête sur les épaules et avoir mûri son projet ».

Les générations précédentes ont, bien souvent, capitalisé sur leur outil de travail car elles avaient une visibilité. Ce n’est pas le cas pour la nouvelle génération. Alors que le montant moyen d’une installation se situe actuellement entre 300 000 euros et 400 000 euros, le repreneur doit avoir conscience que l’activité dans laquelle il souhaite se lancer comporte de grandes incertitudes. Il est donc préférable que le risque ne repose pas uniquement sur ses épaules. Sur ce point, une installation dans un cadre sociétaire peut être rassurante. Pour Hervé Vandierendonck, responsable du marché agricole au Crédit agricole Brie Picardie, « le jeune doit être capable d’appréhender et d’évaluer les risques de son futur métier. Même si l’approche économique est réalisée grâce à l’accompagnement d’un conseiller d’entreprise, il doit maîtriser son prévisionnel et ses chiffres, et notamment connaître ses coûts de revient et son seuil de rentabilité. »

Un dossier doit être bien cerné par la banque. Il est nécessaire que plusieurs rencontres et échanges aient lieu. « Le financement ne peut pas se faire en quelques semaines », insiste Christelle René. Le profil des candidats et leurs expériences sont diverses. Toutefois, des tendances se dessinent. Dans un cadre familial, ils sont souvent plus jeunes que ceux qui se lancent hors cadre. Même si la présence d’un entourage familial rassure, « nous les encourageons à suivre le parcours à l’installation s’ils le peuvent. Ils y rencontrent divers interlocuteurs et bénéficient de formations », explique Sébastien Lecomte. Au-delà du fait que l’installation aidée est un moyen d’assurer une partie du financement, cela permet de prendre de la hauteur.

Et si ça coince ?

Montant de l’installation trop important au vu de la rentabilité de la future activité, projet jugé trop « de niche », manque de référence… Les raisons pour lesquelles un financement bancaire est refusé sont variées. La banque peut proposer d’autres solutions. « Nous avons signé un partenariat avec la plate-forme participative Bluebees. Cela nous permet de ne pas assumer le risque seul », explique Sébastien Lecomte. De même, certaines banques se sont associées localement à la Safer pour permettre aux porteurs de projet de bénéficier d’un système de portage de foncier.

Reste l’épineuse question des garanties, parfois considérées comme exorbitantes par les demandeurs de prêts. Les banques répondent unanimement : « Un manque de garanties n’a jamais empêché le financement d’un projet. » Vraiment ?