C’était la quatrième et dernière fois que Stéphane Le Foll remettait, en tant que ministre de l’Agriculture, le prix de l’Afja (Association française des journalistes agricoles, lire l’encadré). Et ce rendez-vous a été l’occasion pour lui de revenir sur son mandat marqué par « un record de durée, de longévité, de difficultés ».

Des remords

Comme la veille à l’issue du conseil des ministres, il a avoué avoir des remords de ne pas avoir su convaincre ses homologues européens plus tôt pour enrayer la crise. « J’ai mis sept ou huit mois à les convaincre ». Mais, des remords vite balayés. « Le plan de soutien a été mis en œuvre de la façon la plus efficace et le plus rapidement possible ». Selon lui, c’est maintenant l’impact du retrait de la production de lait sur la remontée des prix qui permettra une réelle sortie de crise.

 

Et pour ceux qui ne pourraient se relever, « j’ai demandé une vraie discussion, pour voir qui est en rupture, quelles formations proposer, comment accompagner les reconversions, comment cumuler emploi et retraite. Je cherche aussi à rendre accessible les moyens du droit commun que sont le RSA ou la prime d’activité (demandée par 77 000 agriculteurs, selon la MSA) ».

Des ambitions

L’objectif du ministre est de défendre l’agroécologie jusqu’au bout de son mandat, en mai. « Une grande journée de débats sera organisée le 15 décembre prochain sur l’ensemble des grands chantiers, et en particulier l’agroécologie, lancée il y a quatre ans, le 12 décembre 2012 », avec la mise en avant de projets pionniers.

 

« Il faut passer de pionner à ambassadeur », a déclaré le ministre rappelant les opportunités économiques de l’environnement. Il ne lâche rien sur le sujet, en particulier autour des sols pour lesquels il veut une « politique dynamique ». Et incitative.

 

Il a ainsi regretté la rigidité des MAEC mises en place au niveau européen et qui ne peuvent être activées que si l’agriculteur perd de l’argent en adoptant des bonnes pratiques, alors que gain économique et aides financières pourraient, selon lui, se cumuler. En attendant, le 26 octobre, il sera en Grande-Bretagne sur le même thème, à l’invitation du Prince Charles et de sa fondation 4 pour 1 000.

Une réforme lancée

Le ministre de l’Agriculture est aussi revenu sur les avancées de Chambord, ce sommet européen informel du 2 septembre 2016, dont il a eu l’initiative à la suite du Brexit. L’objectif était d’ouvrir des pistes de réflexion pour la Pac post-2020. « Jamais un Conseil des ministres n’avait anticipé à ce point – quatre ans à l’avance – une réforme de la Pac », s’est-il félicité. Même s’il était le seul ministre encore en poste à avoir négocié la réforme de 2013 et qu’il ne sera pas là, pas plus que la plupart de ses homologues pour négocier 2020, « cela reste un acte fort ».

 

D’ailleurs, la présidence slovaque de l’UE a décidé d’organiser le mois prochain un déjeuner informel pour donner une suite aux idées amorcées à Chambord et notamment approfondir l’idée d’un troisième pilier de la Pac consacré à la gestion des risques. L’une des questions posées, partagée par pas moins de 22 États membres, est notamment de rendre « contracycliques » les aides européennes « dans un budget européen qui n’est pas fédéral et adaptable en fonction des dépenses annuelles ».

 

Stéphane Le Foll a annoncé qu’un rapport du CGAER serait publié sur ce sujet d’ici à la fin de l’année. Sur l’idée des députés européens, notamment le socialiste Eric Andrieu, de lier davantage les aides Pac à l’emploi, il met en garde contre « des effets de transferts colossaux ». « Il faut être honnête, on ne gardera pas la même enveloppe d’aide si l’on passe d’une aide à l’hectare à une aide à l’emploi. Il faut arbitrer. La Roumanie compte 3,5 millions d’actifs et la France 400 000. En revanche, nous avons plus d’hectares agricoles. C’est pourquoi j’ai proposé le paiement redistributif sur les 52 premiers hectares, qui aura permis en 2019 une redistribution historique des aides Pac : les 20 % d’exploitations qui toucheront le plus d’aides percevront 47 % des aides. On est loin des 20 % qui touchent plus de 80 %. »