Au domaine de Restinclières à Prades-le-Lez, dans l’Hérault, l’Inrae suit depuis 28 ans une parcelle de 4 ha en agroforesterie. Entre des lignes de noyers, des bandes de 12 m de largeur ont porté du blé dur, du pois, du colza ou encore de la féverole. À partir de l’âge de 10 à 15 ans, ces arbres ont commencé à modifier le microclimat.

« Ils ont un effet brise-vent. Leur ombre, qui balaye la culture durant la journée, freine l’évapotranspiration et réduit la température, en particulier en fin d’après-midi. Cela limite les risques d’échaudage du blé dur, par exemple », relève Christian Dupraz, de l’Inrae de Montpellier, qui a mis en place cet essai en 1995. « La nuit, les arbres freinent aussi le refroidissement au niveau de la culture », observe Marie Gosme, qui suit aujourd’hui cette parcelle.

Les arbres fournissent également d’autres services. La présence de leurs feuilles au sol durant l’hiver limite l’installation des adventices. La parcelle étant entourée de bosquets, l’effet sur les auxiliaires est moins net. Mais les bandes arborées abritent d’autres espèces, ce qui améliore la biodiversité. « Et les lignes d’arbres guident les chauves-souris, qui viennent ainsi manger des insectes dans la parcelle », ajoute Christian Dupraz.

Les buttes à leur pied facilitent l’infiltration des pluies et limitent l’érosion. Leurs racines, dont une partie meurt chaque année, apportent de la matière organique et contribuent au stockage du carbone. « Elles sont abondantes sur une profondeur de six mètres », relève-t-il.

Vingt ans sans concurrence

Les racines des arbres s’étendent sous toute la largeur de la bande cultivée et freinent les flux verticaux responsables du lessivage des engrais et des pesticides. Elles descendent jusqu’à la nappe et s’y approvisionnent, sans priver les cultures d’eau. Le feuillage, par contre, réduit la lumière qui arrive jusqu’à celles-ci à partir du mois de mai.

© Inrae - Avec une culture d'été comme le maïs, la concurrence des arbres est bien plus forte.

« Durant 20 ans, nous n’avons pas observé de différence de rendement avec la parcelle témoin, qui porte les mêmes cultures mais sans arbres. À partir de 2016, une concurrence est apparue qui s’est amplifiée au fil des années, car leur ombre sur la culture s’est accrue », note Marie Gosme. Avec des lignes plus espacées, cette concurrence aurait démarré plus tard.  « Mieux vaut planter seulement 50 arbres/ha, en prévoyant une largeur des bandes cultivées du double de la hauteur des arbres à l’âge adulte », conseille-t-elle.

Dans cette parcelle, les noyers devraient être valorisés dans les cinq ans à venir. « Dès que leur tronc va arriver à 45 cm de diamètre, nous allons les abattre », note Christian Dupraz. Pour 50 arbres/ha, avec une production d’un mètre cube par arbre et un prix de vente de 500 à 1 000 €/m3, le chiffre d’affaires du bois devrait atteindre 25 000 à 50 000 €/ha au bout de 35 à 40 ans. De quoi compléter la marge tirée des cultures.