Les auteurs de cette note ont regardé le passé pour éclairer l’avenir. Ils se sont penchés sur les épisodes de volatilité qu’ont connus les marchés agricoles de 1990 à 2014. Sur cette période, ils ont identifié cinq fluctuations extrêmes : la première flambée de 2007-2008, l’effondrement qui a suivi, la hausse de 2010-2011, la brève explosion des prix durant l’été 2012, et enfin, la longue période de dégradation qui a suivi.
Un changement dans la structure des marchés
Premier enseignement : lors de l’épisode de 2007-2008, c’est « une hausse brutale de la demande » qui explique la flambée du soja. Pour le maïs, c’est la montée en puissance de la production d’éthanol aux États-Unis qui a joué. « Les auteurs ont mis en évidence, à partir de l’année 2007, un net couplage entre les prix du maïs et de l’éthanol. Si c’est le prix du maïs qui est directement impacté, les mouvements importants se répercutent sur les prix des autres céréales. »
De cette étude, les auteurs proposent six indicateurs pour anticiper les mouvements extrêmes des prix des produits agricoles :
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Les écarts de prix entre deux échéances
Pour un contrat à terme, ils « peuvent être révélateurs d’informations sous-jacentes aux marchés ».
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La volatilité implicite
Elle est déduite du prix des options échangées sur les marchés à terme. « Le prix des options reflète les anticipations par les opérateurs des variations futures du prix du contrat sous-jacent. »
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Les variations extrêmes
Les variations extrêmes : « Constatées sur plusieurs mois, elles sont souvent précédées par des turbulences observées sur des périodes plus courtes. La détection de ces dernières […] donne des informations importantes sur l’offre et la demande, que seuls les traders les mieux informés sont en mesure d’interpréter dans les premiers temps. Et, même dans le cas où le mouvement de prix à court terme détecté n’est pas déterminé par une information cruciale, il peut traduire des flux significatifs d’investissements spéculatifs, avec de potentiels effets d’entraînement à la baisse ou à la hausse » ;
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Des écarts de prix significatifs
Les auteurs ciblent les écarts de prix significatifs entre différents produits généralement corrélés. Ces écarts « signalent des tensions sur certains marchés, sur lesquels les opérateurs ont du mal à arbitrer. Ces tensions peuvent se traduire ensuite par des mouvements de prix majeurs sur le marché concerné ou éventuellement se propager à un autre produit. Ces écarts de prix, en révélant les tensions sous-jacentes, peuvent aider à anticiper de futurs mouvements extrêmes. »
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Le ratio stocks/utilisation
« Les projections de stocks de fin de campagne constituent une information clé déterminant les prix des grains, immédiatement intégrée par les traders. [Les mouvements de prix extrêmes] ont généralement été précédés ou accompagnés de points de rupture dans la corrélation négative entre variations de prix et variations du ratio. »
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Les volumes échangés
« Les activités de spéculation sur les marchés financiers peuvent être révélatrices de fluctuations extrêmes à venir. Les volumes sont un meilleur indicateur des futures variations extrêmes de prix que les positions ouvertes ou encore les positions détenues par des opérateurs non commerciaux. Il existe en effet une forte relation de long terme entre prix et volumes. »
Des indicateurs qui restent à valider
Les auteurs de cette étude appellent tout de même à « une certaine prudence » concernant ces six indicateurs et leur utilisation potentielle. Ils pourraient « générer de “faux signaux”. Les associer pourrait réduire les risques d’une fausse prédiction. » Ensuite, il reste à tester et valider « leur prédictibilité réelle, et donc leur fiabilité, lors de variations de prix postérieures » à la période de l’étude, c’est-à-dire après 2014.