Rebondissement cette semaine en blé et orge, soutenus principalement par le climat nord-européen et de la mer Noire. Le maïs se détache de cette tendance avec des conditions climatiques favorables aux États-Unis.

Le blé redémarre

Après la pause de la semaine dernière, les prix du blé sont repartis à la hausse, les valeurs de la nouvelle récolte gagnant entre 0,50 et 3,00 €/t selon les places. Le blé meunier de la nouvelle récolte s’affiche maintenant à 179,25 €/t rendu Rouen (en base juillet), en hausse de 3 €/t, au même niveau que celui de La Pallice (+2,5 €/t). Dans l’est de la France, en revanche, la progression a été moins marquée (+0,5 €/t en Moselle et à Creil).

Les blés français se sont donc appréciés malgré la petite reprise de l’euro face au dollar et malgré la stabilisation des prix américains. C’est la mer Noire qui est à la manœuvre avec une appréciation cette semaine de 3 $/t des blés fourragers ukrainiens (à 195 $/t Fob) et de 5 $/t des blés meuniers russes (à 207 $/t Fob).

Malgré l’arrivée de pluies dans le sud de la Russie, la sécheresse du mois de mai et les fortes températures ont causé des dégâts. Et plus les semaines passent plus les estimations de récolte de l’Ukraine et de la Russie sont revues à la baisse. Rien de catastrophique mais cette situation vient confirmer de plus en plus le fait que la mer Noire ne pourra pas exporter en 2018-2019 autant que cette année. C’est l’hypothèse que nous retenons depuis plusieurs semaines et cela devrait conduire l’Union européenne à accroître ses exportations vers les pays tiers au cours de la prochaine campagne.

Autre élément haussier cette semaine : il apparaît désormais que la situation très sèche et chaude du mois de mai a fortement dégradé les potentiels de rendements en Pologne, dans le nord-est de l’Allemagne, en Scandinavie et dans les pays baltes. Alors que les perspectives de rendements restent bonnes en France et dans l’ouest de l’Union européenne, la production aura du mal à égaler le niveau de l’an passé à cause de ces dégâts dans le Nord, d’une part, et de perspectives moins bonnes que l’an passé en Bulgarie et Roumanie.

Les prix le reflètent et la situation encore fragile en Australie, où des pluies sont encore nécessaires, vient accroître les incertitudes.

Les exportations du mois d’avril en France ont été élevées, illustrant la bonne compétitivité de la France sur la fin de la campagne. Néanmoins, les stocks attendus à la fin de juin seront confortables. Avec une bonne récolte, la France pourrait ainsi faire face à une petite pression de dégagement avant de pouvoir, dans un second temps, bénéficier à nouveau de la tension mondiale.

Des soutiens pour les orges

L’orge fourragère a suivi le blé à la hausse à Rouen (+3,5 €/t, à 169,75 €/t) alors que les prix se sont plutôt affaissés en Moselle (–2,5 €/t, à 161,75 €/t). Les inquiétudes concernant les rendements dans le nord et l’est de l’Union européenne ont soutenu les prix, dans un contexte mondial que nous attendons encore assez tendu, marqué par le maintien d’une bonne demande du Proche-Orient et de la Chine.

La Jordanie vient d’ailleurs d’acheter 120 000 tonnes d’orge le 5 juin pour chargement en septembre et a relancé hier un nouvel appel d’offres pour la même quantité. Il n’est pas certain que cette demande soit servie par l’Union européenne mais ce n’est pas exclu.

Les orges de brasserie de printemps, elles, ont vu leur prix grimper plus fortement (+6 €/t Fob Creil, à 197 €/t) en raison des grosses inquiétudes concernant les céréales de printemps en Allemagne et en Scandinavie.

Chute en maïs

Contrairement à ceux des céréales à paille, les prix du maïs se sont affaissés sur le marché français au cours de la semaine. Cette évolution est conforme au bilan qui laisse apparaître des excédents potentiels en fin de campagne.

L’impact de cette situation lourde en France pour le dernier trimestre (juillet septembre) de la campagne de 2017-2018 a été renforcé par la chute des prix sur le marché mondial (–6 $/t pour les maïs ukrainiens, –8 $/t pour les maïs sud-américains et –8 $/t pour les maïs américains cette semaine). Les valeurs baissent à cause de stocks qui restent élevés dans le monde mais surtout en raison de l’amélioration des conditions climatiques aux États-Unis et du bon démarrage du cycle de culture dans le Midwest. La poursuite des disputes tarifaires entre les États-Unis et le reste du monde, avec les incertitudes qui en découlent pour les échanges mondiaux, ont contribué aussi à un sentiment baissier.

Il est à noter toutefois la nette dégradation de l’état des cultures dans le sud-ouest de la France où le début du cycle de production est fortement entravé par les orages.

Le colza et le soja plombés par la pluie

Les bonnes conditions climatiques en Amérique du Nord font chuter les cours du colza et du soja outre Atlantique. Le retour des pluies dans les plaines de l’Ouest canadien ces derniers jours a fait beaucoup de bien aux cultures, notamment dans la province du Saskatchewan où le déficit hydrique était le plus prononcé. Le sud-ouest de la province reste néanmoins encore trop sec, et des pluies doivent arriver rapidement sous peine de pertes sur le potentiel de rendement du canola.

Aux États-Unis, les conditions de cultures sont très bonnes, avec des sojas dans un état jugé bon ou excellent sur 75 % des surfaces, un niveau historiquement élevé. Les semis, réalisés rapidement et dans de bonnes conditions, ont permis une bonne levée des plantes. Les travaux d’implantation sont presque terminés (87 % des intentions étaient réalisées au début de juin).

Les prévisions météorologiques confortent l’optimisme sur l’état des cultures oléagineuses en Amérique du Nord, avec des pluies régulières prévues sur les 15 prochains jours dans l’Est canadien, et dans le Midwest américain. En Australie, les précipitations restent inférieures à la normale sur les 30 derniers jours, mais des pluies sont attendues d’ici à la fin de juin. La situation reste néanmoins préoccupante, les réserves hydriques étant faibles dans ce pays.

Par ailleurs, les négociations commerciales entre les États-Unis et Chine ne sont pas terminées, et l’incertitude sur leur issue pèse également sur les prix américains. Pour le moment, les acheteurs chinois continuent de se tourner vers l’origine brésilienne sur l’été par prudence, de crainte d’être fortement taxés sur leurs achats de soja américain à l’arrivée des bateaux dans les ports.

Par conséquent, le cours du soja chute de 16 $/t sur le marché de Chicago cette semaine en ancienne campagne et de 15 $/t sur l’échéance de novembre 2018 (nouvelle campagne). Le canola canadien recule de 13 $/t. Les prix du colza français résistent plutôt bien avec une baisse de 2 €/t seulement sur Euronext, de 1 €/t rendu Rouen et de 2 €/t fob Moselle. En Allemagne, dans le centre et de nord de l’Union européenne, les conditions sèches par endroits et très chaudes continuent d’inquiéter, ce qui soutient les prix européens du colza.

En France, le prix du tournesol reste inchangé depuis cinq semaines, à 320 €/t à Saint-Nazaire. Les semis sont pratiquement terminés dans toutes les régions françaises et les conditions de culture sont plutôt bonnes. Des excès d’humidité dans les sols perdurent néanmoins dans le Sud-Ouest, ce qui est à surveiller.

Les conditions de développement restent correctes en Espagne et en Italie avec des pluies régulières.

Dans la zone de la mer Noire, les travaux de semis sont pratiquement terminés. Les surfaces semées en tournesol ont atteint un niveau historique. Les précipitations sont inférieures à la normale en Russie, en Ukraine et en Roumanie depuis un mois, et pourraient le rester sur la fin du mois de juin.

Effondrement du tourteau de soja

Le prix du tourteau de soja à Montoir est largement influencé par la chute des cours du soja sur le marché américain : il diminue de 15 €/t entre le 31 mai et le 7 juin, dans ce sillage de son homologue nord-américain (–19 $/t sur l’échéance de juillet 2018).

Le prix du pois fourrager remonte de 3 €/t en ancienne et nouvelle à 190 €/t. Son attractivité dans les aliments industriels s’émousse donc un peu ces derniers jours. Le pois était dans de bonnes conditions en France à la fin de mai. La situation est à surveiller, les températures prévues au-dessus des normes pouvant affecter négativement le rendement de ce protéagineux.

Tallage

À suivre : conditions climatiques dans le nord de l’Union européenne, dans la zone de la mer Noire et en Australie, attitude commerciale des États-Unis, développement des cultures de maïs et soja en Amérique du Nord.