Les cours du blé se maintiennent sur le marché français, mais les prix fourragers s’affaissent sous l’influence des volumes d’orge disponibles et de la rechute des prix mondiaux du maïs. Les discussions entre les États-Unis et la Chine, ainsi que la montée des prix des huiles végétales, soutiennent en revanche le complexe oléagineux.
La concurrence ravivée
Comme la semaine dernière, pas de grande évolution pour les prix de blé français : les valeurs s’apprécient de 1 €/t environ sur le marché physique, à 174,25 €/t rendu Rouen et La Pallice (base : juillet) mais le Matif, en baisse depuis deux jours, abandonne 1 €/t sur l’échéance de décembre (à 177,5 €/t). Cette évolution du contrat à terme va sans doute se reporter sur les prix physiques dans les jours à venir.
Ce recul est dû à la petite baisse de Chicago (peu d’exportations au départ des États-Unis) mais aussi à une légère diminution du prix des blés russes. Ces derniers ont perdu 3 $/t, à 207 $/t Fob pour les blés à 12,5 % de protéines. Ils valent maintenant 6 $/t de plus que les blés français sur le marché mondial alors que l’écart était de 12 $/t la semaine dernière.
Les prix russes semblent avoir atteint un palier et leur ajustement à la baisse constitue l’élément clef de la semaine. L’absence de la Russie parmi les pays exportateurs retenus par l’Égypte au cours du dernier appel d’offres d’octobre, le 29, a contribué à cette réaction baissière modérée des prix russes.
En conséquence, la Russie a de nouveau réussi à se placer sur l’Égypte cette semaine lors de l’achat du 5 novembre. Elle a vendu 1 bateau (55 000 tonnes) alors que Le Caire a pris 2 bateaux de blé français (120 000 tonnes) et 2 bateaux de blé ukrainien (115 000 tonnes). Les Français ont été vendus à un niveau légèrement inférieur à ceux de la mer Noire : 232,44 $/t contre 234,6 $/t arrivés à destination.
L’avantage des blés français par rapport aux blés de la mer Noire se resserre. Il en est de même pour la relation entre les blés français et les blés argentins dont le prix est resté stable cette semaine malgré une nouvelle révision à la baisse de la récolte argentine. Actuellement, les blés français, ukrainiens et argentins se retrouvent à parité à destination du Maroc par exemple. La concurrence est serrée et risque de s’intensifier avec l’arrivée physique des blés argentins sur le marché dans quelques semaines.
Quelques nouvelles haussières néanmoins
Sur un autre front, plus haussier, une des actualités de la semaine provient du Brésil qui a entériné cette semaine l’ouverture d’un quota d’importation sans taxe de 750 000 tonnes de blé en provenance d’autres pays que le Mercosur. Cela pourrait profiter aux blés américains mais avec les relations de prix actuelles, il n’est pas exclu que des blés allemands ou baltes se positionnent sur ce créneau.
À souligner aussi cette semaine : les retards de semis en Europe de l’Ouest (France et Royaume-Uni notamment) à cause de l’excès de précipitations alors que la situation est plutôt un peu trop sèche en Europe du Sud-Est.
Nouvelle chute des prix fourragers en orge
Les prix de l’orge fourragère continuent de descendre doucement et perdent de nouveau 1 €/t cette semaine, à 163 €/t rendu Rouen (base : juillet). Le net ralentissement des chargements à destination des pays tiers, avec l’absence actuellement de chargements vers la Chine, en est la principale explication. De nouvelles exportations se feront vers l’empire du Milieu, mais qu’à partir de janvier. Même avec cette reprise attendue et de bonnes performances à l’exportation pour l’ensemble de la campagne, le bilan français des orges fourragères va rester bien lourd, ce qui devrait continuer de peser sur les prix.
Sur le créneau brassicole, on note un renversement cette semaine : le prix des orges de printemps repasse au-dessus de celui des orges d’hiver (162 contre 161 €/t respectivement Fob Creil, base juillet). Néanmoins, l’écart de prix entre les escourgeons et les orges de printemps demeure extrêmement bas en raison de l’ampleur de l’offre brassicole de printemps (les malteurs acceptant des taux de protéines assez faibles).
Essoufflement du maïs
Les prix du maïs sont repartis à la baisse sur le marché mondial avec la lente progression de la récolte américaine et le bon déroulement de la récolte ukrainienne. Les prix américains chutent aussi en raison de la faiblesse des ventes au départ des États-Unis, cette origine étant nettement plus chère que la marchandise ukrainienne (175 $/t contre 167 $/t Fob) ou argentine (164 $/t Fob).
Aux États-Unis, les inquiétudes qualitatives montent en raison du retard des récoltes et des conditions très humides qui ont prévalu jusqu’à maintenant. La présence de mycotoxines n’est pas rare. Les farmers ont du mal à faire sécher leurs grains en raison d’un manque de gaz, les infrastructures d’approvisionnement s’avérant insuffisantes pour alimenter les séchoirs face à des quantités à sécher beaucoup plus importantes que d’habitude.
Cette orientation baissière affecte aussi les prix français qui perdent 2 €/t cette semaine à 165 €/t Fob Rhin et 162,5 €/t Fob Bordeaux (base : juillet). Les opérateurs sont toutefois dans l’attente du rapport de l’USDA de ce soir mais il semble peu probable que le ministère américain de l’Agriculture révise beaucoup ce mois-ci son estimation de la récolte américaine. Il faudra sans doute attendre janvier pour cela.
Le colza tiré par les huiles
Les cours du colza dans l’Union européenne se sont encore appréciés durant la semaine en glanant 7 €/t à Rouen (à 392 €/t) et même 10 €/t pour le Fob Moselle (à 394 €/t). La hausse du colza est en revanche un peu moins marquée sur les marchés à terme où l’échéance de février a gagné 5 €/t (à presque 388 €/t).
Ils ont évolué dans le sillage des huiles de soja et de palme surtout. La sécheresse et l’utilisation moindre de fertilisants en Indonésie et en Malaisie offrent en effet de faibles perspectives de croissance de la production d’huile de palme, tandis que la demande mondiale reste bien dynamique, ce qui fragilise les stocks.
Les prix des graines de canola échangées en dollars canadiens se sont également un peu raffermis depuis la semaine dernière en progressant de presque 3 $/t à Winnipeg. Cette hausse est en revanche gommée sur les prix en dollars américains, la devise canadienne s’étant affaiblie.
Selon les derniers retours de terrain, 88 % du total des surfaces ont été récoltés dans le Saskatchewan à la fin d’octobre tandis que ce taux s’élève à 90 % dans le Manitoba. En revanche, la récolte accuse toujours un retard dans l’Alberta, 71 % des surfaces ayant été moissonnées. Il resterait ainsi environ 2 Mt de canola à prélever dans les champs au niveau national.
Les cours canadiens sont également soutenus par une demande en trituration qui demeure bien présente depuis le début de campagne. En outre, les disponibilités exportables ukrainiennes sont désormais presque asséchées.
Timide reprise du soja
Les annonces prometteuses de la signature d’un accord partiel entre la Chine et les États-Unis dès la mi-novembre ont soutenu les prix de la fève à Chicago au début de la semaine. L’optimisme concernant la résolution prochaine du conflit commercial entre les deux grandes puissances économiques s’est toutefois érodé au milieu de la semaine à la suite des rumeurs d’un report probable à décembre de la rencontre des signataires, ce qui a stoppé la progression des prix.
Le gouvernement chinois a en effet signalé qu’il attendait certaines contreparties après avoir tendu la main à Washington le mois dernier en octroyant notamment un quota de 10 millions de tonnes d’importations de soja américain exempté de taxe. Les prix du soja se sont même temporairement repliés au milieu de la semaine en raison de l’amélioration des conditions météorologiques dans les plaines américaines où la réduction draconienne des précipitations devrait permettre l’accélération des dernières moissons.
D’après l’USDA, près de 75 % des surfaces avaient été récoltées au 3 novembre (contre 87 % en moyenne quinquennale). En parallèle, la demande est restée assez ferme sur le marché de l’exportation selon les dernières déclarations hebdomadaires américaines qui sont ressorties bien au-dessus des attentes des opérateurs, redonnant un petit coup de fouet aux cotations de la fin de la semaine.
La fève de soja a ainsi gagné 4 $/t en moyenne sur la semaine (à 340 $/t) et a entraîné dans son sillage le tourteau à Montoir (+4 €/t) ainsi que le pois fourrager (+3 €/t).
Petite progression des prix français en tournesol
En se renchérissant de 5 €/t cette semaine à Saint-Nazaire (à 330 €/t), le tournesol français s’est contenté de suivre la hausse du colza et des huiles. Les cotations en mer Noire sont en revanche restées stables, la bonne avancée des récoltes en Ukraine et l’offre pléthorique en vue empêchant toute montée des prix.
À suivre : rapport de l’USDA de ce soir vendredi 8 novembre, négociations commerciales entre Pékin et Washington, Brexit, récolte américaine de maïs, positionnement à l’exportation des blés russes.