L’Afja (association française des journalistes agricoles) et l’AJE (association des journalistes de l’environnement) ont organisé vendredi 23 mars une table ronde sur le thème « Comment sortir du glyphosate ? ».
Des AMM pour 5 ans
À cette occasion, le directeur général de l’Anses (agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), Roger Genet, est intervenu notamment pour répondre à la question : « comment le gouvernement peut-il mettre en œuvre la volonté d’arrêter le glyphosate dans un délai maximal de trois ans ? ».
« Aujourd’hui, il y a nécessité de rechercher des alternatives dans un contexte où il faut prendre en compte non seulement les usages mais aussi le besoin de lutter contre l’apparition de résistances », a-t-il rappelé. « Sur la réglementation les choses sont extrêmement claires, a stipulé Roger Genet. Le glyphosate a été réautorisé pour une période de 5 ans. Et chaque État membre va donner des autorisations pour les produits qui contiennent ces substances actives. Par reconnaissance mutuelle, un produit autorisé dans une des trois zones existantes peut l’être dans un autre pays de la même zone. »
Jusqu’en 2017, il y avait environ 250 autorisations de mises sur le marché (AMM) de produits contenant du glyphosate en France. Près de 130 étaient réservées à l’usage « jardin » (qui tombe au 1er janvier 2019). Sur les 120 restants, il y a une soixantaine de dépôts d’AMM à ce jour. Dans un délai de 12 mois, il va falloir que l’agence réautorise et redélivre les AMM dans le cadre de cette nouvelle homologation. « Comme c’est le délai de la substance active qui prévaut, les AMM seront donc valables pour un délai de 5 ans », a insisté Roger Genet.
Risque de contentieux avec la Commission européenne
Pour mettre en œuvre la volonté du gouvernement de se passer du glyphosate d’ici 3 ans, Roger Genet a précisé qu’« il faudrait avoir des éléments nouveaux qui laisseraient à supposer qu’on a un effet immédiat sur la santé et l’environnement et qui nous amènerait à faire un retrait d’AMM, comme nous l’avons fait pour le glufosinate dernièrement. Et en l’état actuel des connaissances, nous n’avons pas d’éléments scientifiques qui nous amènent à faire un retrait immédiat. »
Ce dernier a par ailleurs rappelé que sur le plan juridique, l’autorité pour délivrer ou retirer les AMM a été transférée à l’Anses par la loi d’orientation agricole de 2013. « Mais le ministère de l’Agriculture et celui de l’Environnement ont un droit de veto sur nos décisions, qui est justifié par le risque immédiat pour la santé et l’environnement, a stipulé Roger Genet. Le gouvernement pourrait prendre des mesures transversales d’interdiction des usages (et non pas des AMM) comme ça a été le cas pour les néonicotinoïdes (loi biodiversité). Mais il y a un risque de contentieux avec la Commission européenne si on n’est pas dans un cadre harmonisé. »
Toutefois, dans le cadre des États Généraux de l’Alimentation, il a été demandé à l’Agence un cahier des charges pour lancer des études complémentaires. « Au cours des mois qui viennent, nous aurons défini ce cahier des charges qui prendra en compte les effets cancérogène et génotoxique, a rapporté le directeur général de l’Anses. Ceci dit, ces études nécessiteront 3 à 5 ans pour obtenir des nouveaux résultats ».
Des alternatives ?
Au sujet des alternatives, Denis Longevialle, secrétaire général d’IBMA (association française des entreprises de produits de biocontrôle) France, a précisé que pour le moment les grandes cultures et les herbicides restent le parent pauvre du biocontrôle. Il a toutefois ajouté que le travail s’orientait à l’avenir plutôt sur des associations d’idées afin de trouver des solutions combinatoires.
Xavier Reboud, directeur de recherche à l’Inra, a de son côté insisté sur la nécessité de modifier les systèmes de culture, avec plus d’agronomie.