« La première partie de l’année 2025 a été animée par la mise en place de taxes européennes, au 1er juillet, sur certains engrais russes et biélorusses importés en Europe, décrit Claudia Wlk, spécialiste du marché des engrais chez Argus Media. Si globalement toute la filière agricole validait l’objectif — arrêter de financer l’effort de guerre — les agriculteurs craignaient une envolée des prix de l’azote. »
« On a constaté, juste avant leur entrée en vigueur, la constitution de stocks avec une très forte hausse des importations d’engrais russes et biélorusses, avant une nette diminution, poursuit-elle. Sur la période de juillet à septembre, les achats ont reculé de 80 % par rapport à la même période en 2024. »
« Les taxes ont ensuite effectivement affecté la disponibilité des engrais azotés, notamment de la solution azotée. Mais pour le moment, c’est assez difficile de chiffrer leur impact. Car sur le dernier trimestre, c’est le MACF (mécanisme d’ajustement carbone aux frontières) qui a principalement chahuté le marché. »
« À noter que la Commission européenne a proposé cet été, dans le cadre de son accord avec les États-Unis, de supprimer les taxes — qui existent aussi sur les autres origines extra-européennes — sur les engrais américains. La mesure pourrait aboutir en 2026, et atténuer les conséquences des taxes russes. »
« Ce dispositif a été pensé pour faire payer les émissions carbone des produits importés dans l’Union européenne, les mettant ainsi sur un même pied d’égalité que les marchandises produites localement. Tous les secteurs émetteurs sont concernés, dont les engrais. Là encore, les agriculteurs se sont beaucoup inquiétés des répercussions sur leurs prix d’achat, mais aussi de la mise en œuvre du mécanisme, prévue au 1er janvier 2026 et dont les modalités étaient encore floues au début de décembre. »
« Comme avant l’entrée en vigueur des taxes russes, on a constaté sur la fin d’année, en anticipation, une hausse des importations en Europe, se souvient. Puis désormais, tout le monde attend de voir ce qu’il va se passer au début de 2026. Avec les éléments disponibles au 9 décembre, on estimait que l’impact serait, selon les origines, de 40 à 45 €/t supplémentaires pour l’urée en provenance d’Afrique du Nord (soit +10 %), de 70 à 95 €/t pour la solution azotée (+25 %), et de plus de 100 €/t pour l’ammonitrate (+33 %). »
« Il faut toutefois bien souligner que ces chiffres doivent encore être confirmés par les derniers textes réglementaires publiés sur les derniers jours de 2025, et que les hausses ne s’appliqueront qu’aux produits importés. L’ammonitrate étant principalement produit en Europe, les 33 % supplémentaires ne devraient donc pas se répercuter aussi fortement sur les prix globaux que les 10 % de l’urée, majoritairement importée. »
« En parallèle, notamment du fait d’une baisse de 16 % des prix du gaz sur les derniers mois, la différence entre le coût de production des engrais et leur prix de vente est actuellement élevée. Cela pourrait favoriser la production européenne en 2026. »
« Les prix du potassium sont restés très stables cette année. Quant au phosphore, nous avons observé de très importantes augmentations pendant une grande partie de l’année avec une forte demande, avant une légère baisse à partir d’octobre. »