Alors que s’ouvre la vingt-cinquième conférence des parties sur le climat (COP 25), les résultats en matière de lutte climatique ne sont pas brillants. Les émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) ont battu un nouveau record en 2018, surpassant celles de 2017, d’après le bulletin publié le 25 novembre 2019 par l’Organisation météorologique mondiale.
« Aucun signe de ralentissement »
Son secrétaire général, Petteri Taalas, n’est guère rassurant sur l’avenir : « Il n’y a aucun signe de ralentissement, et encore moins de diminution, de la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère malgré tous les engagements pris au titre de l’accord de Paris sur le climat. »
Il précise que « la dernière fois que la Terre a connu une teneur en dioxyde de carbone comparable, c’était il y a 3 à 5 millions d’années : la température était de 2 à 3°C plus élevée qu’aujourd’hui, et le niveau de la mer était supérieur de 10 à 20 mètres au niveau actuel. »
En bref, les générations futures doivent se préparer à une « aggravation des conséquences du changement climatique, y compris la hausse des températures, l’augmentation du nombre et de l’intensité des phénomènes météorologiques extrêmes, le stress hydrique, l’élévation du niveau de la mer et la perturbation des écosystèmes marins et terrestres ».
Menace conjointe sur l’agriculture et la pêche
L’agriculture, on le sait, est parmi les premiers secteurs à en pâtir. Les travaux issus d’une collaboration internationale de scientifiques pilotée par le CNRS, publiés le 27 novembre 2019 dans Science Advances, le confirment : 90 % de la population mondiale pourraient être exposés à des baisses de productivité conjointes de l’agriculture et de la pêche s’il n’y a pas de réduction des émissions de GES.
« Il serait impossible de compenser les effets sur la pêche en développant l’agriculture, ou vice versa, les deux secteurs étant tous deux fortement impactés », précise le CNRS. En cas de réduction des émissions telle que celle fixée par l’accord de Paris, la proportion de la population mondiale impactée tomberait à 60 % et les pertes rencontrées seraient moins importantes (celles des pays les plus vulnérables seraient quatre ou cinq fois moins fortes qu’en cas d’inaction climatique).
Comme si de rien n’était
Seulement, depuis la signature de l’accord de Paris (COP 21), aucun effet n’est visible au niveau mondial, constate le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), dans son rapport publié le 26 novembre 2019. « Le niveau d’émission de GES actuel est aujourd’hui presque exactement au niveau des émissions projetées pour 2020 dans le cas d’un scénario business-as-usual [sans politique de réduction des émissions], écrivent les auteurs. Il n’y a eu aucun changement réel dans les émissions globales de GES dans la dernière décennie. »
Si elle reste sur cette lancée, la planète se dirige vers un réchauffement global compris entre 3,4 et 3,7°C en 2100. Si les engagements relatifs à l’accord de Paris sont mis en œuvre, les projections misent sur un réchauffement de 2,9 à 3,4°C. Mais pour un réchauffement inférieur à 2°C, les pays devraient multiplier leurs efforts de réduction par trois. Et même par cinq pour rester sous le plafond de 1,5°C, donné par le Giec comme le seuil à ne pas dépasser si l’on veut contenir à un niveau supportable les effets du changement climatique (inondations, sécheresses, événements extrêmes…).
L’abondance d’études et de rapports alarmants suffiront-ils à pousser à l’action les hauts dirigeants venus des quatre coins de la planète ? L’état de la planète nécessiterait la prise de nouveaux engagements plus ambitieux. Mais il y a fort à parier que les chefs d’État ne serviront que… du réchauffé.