L’histoire

Cette histoire se passe au cœur de l’Aubrac, au sein d’une section de commune. Cette instance est une structure de gestion concernant un secteur d’une commune dont les droits et biens étaient principalement antérieurs à la Révolution française. Encore aujourd’hui, persistent des sections de commune. Celles-ci possèdent, à titre permanent et exclusif, des biens distincts de ceux de la commune, qui peuvent être attribués par convention à des exploitants agricoles.

Martin, qui exploitait un élevage de bovins dans une commune de l’Aubrac, avait demandé au maire l’attribution de terres agricoles situées dans une section de la commune. Mais le maire n’avait pas répondu et une décision implicite de rejet de la demande en était résultée.

Le contentieux

Martin, qui estimait avoir vocation à être retenu comme attributaire des parcelles d’herbage, avait saisi le tribunal administratif en annulation de la décision implicite de rejet. Sa demande était fondée sur l’article L 2411-10 du code général des collectivités territoriales qui dispose que : « Les terres à vocation agricole ou pastorale propriétés de la section sont attribuées par bail rural ou par convention pluriannuelle d’exploitation agricole ou de pâturage […] au profit des exploitants agricoles ayant leur domicile réel et fixe, un bâtiment d’exploitation et le siège de leur exploitation sur le territoire de la section et exploitant des biens agricoles sur celui-ci. » Martin n’avait-il pas vocation à bénéficier de ce dispositif ? Il habitait depuis plusieurs années sur le territoire de la section et le siège de son exploitation y était fixé. Aussi, il n’y avait aucun obstacle à ce que le maire l’autorise à exploiter dans le cadre d’une convention pluriannuelle de pâturage.

Mais le maire avait écarté sa demande pour le motif que Martin n’avait pas encore obtenu l’autorisation administrative d’exploiter, qui lui était pourtant nécessaire. Plusieurs autres exploitants s’étaient portés candidats à l’attribution des biens sectionaux.

Le tribunal administratif et la cour d’appel avaient rejeté le recours de Martin et confirmé la décision du maire. En effet, l’obtention d’une autorisation d’exploiter était une condition préalable à toute demande d’attribution des terres de la section. Mais une telle interprétation du texte était-elle justifiée ?

Saisi d’un pourvoi, le Conseil d’État a répondu par la négative en annulant l’arrêt d’appel. L’article L 2411-10 invoqué n’exige pas que l’autorisation d’exploiter soit délivrée au pétitionnaire avant que l’autorité compétente ne choisisse l’attributaire des biens sectionaux. Aussi, le maire était-il mal fondé à refuser à Martin l’attribution des herbages.

L’épilogue

La cour de renvoi devra annuler la décision du maire et se prononcer sur la demande de Martin en vérifiant qu’il remplit les conditions tenant à sa résidence et au siège de son exploitation. Mais une fois sa candidature à l’attribution des biens retenue, Martin devra solliciter, auprès du préfet de région, l’autorisation lui permettant d’exploiter.