Moins productif que la luzerne, le sainfoin avait été laissé de côté. Mais dans les zones calcaires d’altitude, les éleveurs s’y intéressent à nouveau. « Dans les petites terres caillouteuses, il donne une belle première coupe. Dans notre plate-forme d’essai sur le causse de Sauveterre, nous avons obtenu en 2018 une moyenne de 5,5 t de MS/ha pour les variétés commerciales et de 5,2 t de MS/ha pour les variétés de pays », détaille Chloé Guyot, de la chambre d’agriculture de Lozère.
En 2019, les variétés commerciales ont plus souffert de l’hiver sec et des gelées tardives, et n’ont donné que 4,16 t de MS/ha contre 5,3 t de MS/ha pour les variétés de pays.
Souplesse d’utilisation
Moins exigeant en phosphore que la luzerne, le sainfoin convient mieux aux sols où le calcium bloque le phosphore. Rustique, il s’implante plus facilement, et résiste mieux à la sécheresse et au froid. « Il a des réserves dans son pivot mais également dans le bas des tiges, ce qui l’aide à redémarrer après un stress climatique », explique Estelle Gressier, agronome à l’Association vétérinaires éleveurs du Millavois (AVEM), dans l’Aveyron. « Ce printemps, nous avons eu des gelées tardives. Cette fourragère a mieux résisté que la luzerne », constate Bernard Albouy, du Gaec de la Calcidouze, à Saint-Georges-de-Lévéjac, en Lozère. Cet éleveur de brebis laitières cultive 10 ha de sainfoin-luzerne-dactyle, ainsi que 2 ha de sainfoin pur pour faire sa semence. « Ce sainfoin double vient des Alpes et s’est bien adapté sur notre causse », note-t-il.
Bonne appétence
Cette légumineuse est souvent cultivée en mélange avec des graminées, ce qui facilite le fanage. Plus précoce que les autres espèces, elle a le temps de fleurir avant la première coupe. Très mellifère, elle apporte des ressources aux abeilles. « Riche en sucres solubles, le sainfoin est très appètent quel que soit le stade, et reste consommé même s’il est fauché un peu tard. Il a une bonne souplesse d’utilisation », note Estelle Gressier.
Non météorisant, il convient au pâturage. Mais pour préserver les réserves en bas des tiges, mieux vaut éviter le surpâturage. « Sa pérennité va de trois ans pour un double et jusqu’à quatre ou cinq ans pour un simple, moins productif », relève Chloé Guyot. Seul ou en mélange, il permet de conserver une légumineuse dans l’assolement tout en faisant une pause sans luzerne. « On peut, par exemple, cultiver des céréales puis un mélange avec du sainfoin avant de remettre de la luzerne », poursuit-elle. Frédérique Ehrhard