Retombée des prix cette semaine avec celle des températures et sous la surprise de surfaces de maïs US jugées trop élevées.
Blé : le mercure et les prix redescendent
Revers de médaille cette semaine pour le blé français qui reperd les 5 €/t gagnés la semaine dernière (à 173,75 €/t rendu Rouen). La pression est retombée avec les premiers retours de récolte. Les dégâts de la vague caniculaire ne semblent pas catastrophiques en France même si les perspectives doivent être revues en légère baisse comme l’illustre l’état des cultures mesuré cette semaine par l’observatoire FranceAgriMer (75 % de blés jugés bons à excellents contre 80 % la semaine dernière mais 73 % à la même date l’an dernier).
Pas de catastrophe non plus à l’échelle de l’UE, même si les prévisions européennes sont diminuées car les blés ont souffert, que ce soit en Allemagne, en Pologne ou dans les pays baltes. Il a bien plu au Canada au cours des derniers jours et cela est venu rassurer le marché même si le blé a été implanté en condition très sèche dans ce pays.
Les prix décrochent partout : les blés US abandonnent 20 $/t à la suite des maïs et de l’assainissement de la situation hydrique aux USA. Ils perdent 5 $/t en Russie avec l’avancée de la récolte d’hiver dans le sud. C’est donc un soulagement qu’exprime le marché par rapport à la semaine dernière mais il convient pourtant de rester prudent.
Une situation mondiale du blé moins lourde que prévu
Plus la récolte avance en Russie, plus les dégâts se confirment dans le sud du pays où l’on commence à ressentir une volonté de la part des producteurs de ralentir les ventes. L’Égypte vient d’acheter 60 000 tonnes de blé et c’est ainsi l’origine roumaine qui a été choisie, moins chère que les offres de blé russe. De son côté, l’Arabie a acheté 730 000 tonnes de blé à 12,5 % de protéine et les blés baltes ont de grandes chances d’en servir une large part.
Avec la hausse des prix du maïs au cours des dernières semaines, le blé a encore gagné en attractivité face au maïs dans les rations animales presque partout dans le monde. Cela booste la demande mondiale de blé et va conduire la mer Noire à des exportations très élevées. En Australie, les surfaces semées en blé sont moins élevées que nous l’estimions auparavant et cela va limiter les disponibilités exportables du pays (malgré de meilleurs rendements attendus par rapport à l’an passé). Dans l’UE, la situation du blé reste très confortable mais les quintaux perdus récemment viennent tempérer la situation. Le monde se dirige donc vers une situation moins lourde en blé qu’il n’apparaissait il y a encore quelques semaines. Cela n’empêche pourtant pas les blés français de rester encore beaucoup plus chers que les blés russes et de manquer d’attractivité.
Maïs : une enquête US aux résultats surprenants
Douche froide aux USA avec le rapport de l’USDA de vendredi dernier. Celui-ci a affiché une estimation beaucoup plus élevée que prévu (près de 37 millions d’hectares, soit 3 % de plus que l’an dernier) concernant les semis de maïs outre-atlantique. Les attentes se situaient en moyenne près de 35 millions d’hectares.
Ce rapport a suscité beaucoup de commentaires et d’interrogations : il mentionnait les résultats d’une enquête effectuée au cours de la première quinzaine de juin sur l’amplitude des semis de maïs déjà réalisés ou à venir aux USA. D’habitude, les semis sont quasi terminés à cette date et l’enquête en question reflète correctement les surfaces cultivées. Cette année, à cause des excès d’humidité, une large part restait encore à planter au 1er juin et il n’est pas sûr que tous les semis aient été menés à bout. Il y a donc de fortes chances que la surface soit révisée à la baisse dans les mois qui viennent. D’un autre côté, étant donné que le prix du maïs avait beaucoup grimpé en mai rendant le maïs très attractif par rapport au soja, il n’est pas exclu que les farmers US aient maximisé les surfaces de maïs, même avec de mauvaises conditions d’implantation.
La situation est donc très ouverte : la production de maïs US va chuter (les rendements seront de toute façon impactés par les mauvaises conditions d’implantation) mais les opérateurs ont pris conscience du fait que les disponibilités resteraient importantes, en tout cas pourraient chuter moins que prévu.
Dans ce contexte, les prix US ont abandonné 8 $/t cette semaine tirant les autres origines mondiales à la baisse, le maïs français perdant entre 2 et 3 €/t, à 166 €/t Fob Rhin par exemple ou 169,5 €/t Fob Bordeaux. Les maïs européens ont pourtant souffert de la canicule qui a traversé l’Europe la semaine dernière (les notations de FranceAgriMer concernant le maïs en bonne et excellente condition chutent de 82 à 79 % cette semaine). Les potentiels de production sont donc à surveiller dans l’UE mais les yeux sont rivés actuellement sur la situation américaine.
Orge : correction à la baisse des orges d’hiver brassicoles
On soulignait la semaine dernière la situation rare d’un prix de l’orge d’hiver brassicole égal à celui de l’orge de printemps. Cette parité ne pouvait persister longtemps, sous peine de faire perdre à l’orge d’hiver sa demande. La hiérarchie habituelle s’est rétablie cette semaine. Les orges d’hiver brassicoles ont abandonné plus de 13 €/t, à 163 €/t Fob Creil, et retrouvent une moins-value de 11 €/t par rapport aux orges de printemps (174 €/t Fob Creil). Les bons résultats de la moisson en orge d’hiver ont contribué à la chute des prix alors que la situation reste plus inquiétante pour les orges de printemps qui ont souffert plus fortement de la canicule.
Les orges de mouture, quant à elles, baissent aussi comme le blé et les orges d’hiver brassicoles ; elles ont perdu 6 €/t cette semaine (à 158,5 €/t rendu Rouen) poussées par les autres céréales mais aussi par les importations ukrainiennes en vue. En effet, les importateurs européens viennent de nouveau de prendre de gros certificats d’importation (160 000 tonnes) pour des orges ukrainiennes. C’est ainsi 300 000 tonnes qui devraient arriver prochainement d’Ukraine dans l’UE, les opérateurs ayant profité du large avantage des orges ukrainiennes face aux orges françaises au début de la campagne. Avec la baisse des prix français, cet écart s’est nettement rétréci (–4 $/t contre –15 $/t il y a un mois) et les prises de certificats devraient maintenant ralentir.
Petit recul du colza avec l’amélioration des conditions météo
Les prix français du colza reculent de 1 €/t cette semaine, à 355 €/t en rendu Rouen et 365 €/t en Fob Moselle. Ils ont été influencés par un environnement baissier au niveau mondial.
En Ukraine, la récolte de colza d’hiver progresse bien ; elle est très en avance par rapport à l’an dernier. Le rendement est pour le moment proche de 2018. Avec une surface record l’Ukraine devrait réaliser une belle performance en colza cette année et frôler les 4 millions de tonnes.
Des conditions climatiques bénéfiques en Australie et au Canada, avec le retour de précipitations généreuses, ont en effet permis une amélioration de l’état des cultures de canola. Quelques poches de sécheresse persistent néanmoins dans ces deux pays. Aux États-Unis, les conditions dans les prairies du Midwest se sont aussi améliorées. Le retour du temps sec, longuement attendu, devrait profiter aux cultures de soja.
Le dernier rapport hebdomadaire de l’USDA sur l’avancée des travaux indique une progression de 7 points à 92 % au 30 juin, contre 99 % en moyenne sur les 5 dernières campagnes. Cela entérine une chute de 10 % de la surface de soja aux États-Unis, après un printemps historiquement pluvieux qui a pénalisé l’avancée des implantations. Malgré ce recul de surface, le bilan US de soja s’annonce toujours très lourd en nouvelle campagne. Il est pénalisé par les faibles achats de soja par les chinois, liés aux longues et difficiles négociations commerciales entre USA et Chine.
Le canola canadien voit ainsi son prix diminuer de 1 $/t cette semaine. Le soja recule de 1 $/t en ancienne récolte, et de 3,5 $/t sur novembre 2019. Le cours du pétrole a aussi eu un effet baissier sur les prix des oléagineux. Il a reculé de 3,5 % sur la semaine, malgré la prolongation de l’accord entre pays de l’Opep de plafonner la production de pétrole brut sur 6 mois. Le baril de pétrole reste ainsi très bas, à 57 $ (à New York).
Conditions excellentes pour le tournesol
Cette semaine, les prix du tournesol départ mer Noire ont perdu 10 $/t à 365 $/t. Les conditions des plantes sont très bonnes dans le centre et le sud-est de l’UE et cela pèse sur les prix. En Ukraine et en Russie, un déficit de précipitation s’est creusé durant les dernières semaines. Toutefois, des pluies sont annoncées en Ukraine sur les prochains jours. Dans le sud de la Russie, la situation ne devrait pas s’améliorer, et reste à surveiller.
En France les prix sont stables, sur l’ancienne (à 340 €/t) et la nouvelle campagne et (à 320 €/t). La récolte se présente bien pour le moment, mais un déficit hydrique et de très fortes températures sur les semaines à venir pourraient pénaliser le rendement.
Stabilité de la cotation du tourteau de soja
Sur le rapproché, le prix du tourteau à Montoir est stable sur la semaine à 325 €/t. La baisse des cours mondiaux (-7 $/t à Chicago), à la suite du soja et du maïs, ne s’est pas répercutée sur les prix français et cela est en partie lié à la chute de l’euro face au dollar US cette semaine. Les larges disponibilités mondiales en soja et tourteau de soja, ainsi que la faible demande mondiale liée à la perte de près de la moitié du cheptel porcin chinois sur les derniers mois, continuent de maintenir les cours des protéines à un niveau très bas.
Le prix du pois fourrager de la moisson 2019 recule de 5 €/t cette semaine à 190 €/t (Eure-et-Loir). Les bons résultats attendus pour les rendements de pois d’hiver pèsent sur les prix. Le pois reste attractif pour les fabricants d’aliments.
À SUIVRE : avancée de la récolte de colza en mer Noire et UE, conditions climatiques nord-américaines (canola, soja, maïs), en Europe de l’Est (maïs, soja, tournesol), en Australie (canola et blé), cours du pétrole, négociations commerciales entre USA et Chine rapport de prix entre blé et maïs.