« Aujourd’hui est un bon jour pour la nature, a déclaré Romina Pourmokhtari, ministre suédoise du Climat et de l’Environnement dans un communiqué de presse du Conseil européen diffusé le mardi 20 juin 2023. Le Conseil s’est mis d’accord sur une approche générale de la loi sur la restauration de la nature. » Proposée à la mi-2022 par la Commission européenne, cette législation imposerait aux Vingt-Sept de mettre en place d’ici à 2030 des mesures de restauration des écosystèmes sur 20 % des terres et espaces marins de l’Union européenne, puis sur l’ensemble des zones abîmées par la pollution ou l’exploitation intensive (forêts, prairies…) pour 2050.
Un accord plus flexible
Avec cet accord conclu par les ministres européens de l’Environnement réunis au Luxembourg, « nous avons trouvé le bon équilibre », a assuré Romina Pourmokhtari, dont le pays occupe jusqu’à la fin de juin la présidence tournante de l’Union européenne. Dans la ligne des objectifs fixés à la COP15 Biodiversité de Montréal, chaque État devrait prendre des mesures de restauration d’ici à 2030 sur au moins 30 % des écosystèmes terrestres et marins abîmés, puis 60 % d’ici à 2040 et 90 % d’ici à 2050, selon un communiqué du Conseil.
Par rapport à la proposition initiale de Bruxelles, l’accord des Vingt-Sept offre davantage de flexibilité sur les modalités d’application. Alors que les exigences de non-détérioration (maintien en bon état) sur de vastes zones naturelles, y compris hors des aires protégées Natura 2000, soulevaient de vives résistances, le compromis prévoit l’obligation de prendre des mesures, mais sans contrainte de résultat.
Surtout, de nombreux assouplissements ont été ménagés sur les obligations spécifiques à chaque type d’écosystème (espaces verts en ville, réhumidification des tourbières, forêts, éléments à haute biodiversité sur les terres agricoles…), et les États ont ajouté une dérogation pour l’installation de projets d’énergies renouvelables ou d’infrastructures de défense. « En ce qui concerne les éléments paysagers à haute diversité dans les écosystèmes agricoles, tels que les haies, les rangées d’arbres, les parcelles, les fossés, les étangs ou les arbres fruitiers, le Conseil a ajouté la possibilité de concentrer les mesures sur celles qui sont nécessaires à la préservation de l’environnement », précise le Conseil européen.
Des réticences subsistent
Ces flexibilités n’ont pas suffi à convaincre une partie des États (Suède, Pays-Bas, Pologne, Autriche, Belgique…). Si les pays scandinaves s’alarmaient de l’impact pour leur puissante sylviculture, les Pays-Bas réclamaient une meilleure prise en compte des zones d’élevage intensif ou des régions densément peuplées. « C’est une bonne loi », a cependant insisté la ministre allemande Steffi Lemke, pour qui « l’agriculture et l’économie forestière dépendent d’une nature intacte ».
Au Parlement européen, la droite et l’extrême droite s’opposent farouchement à un texte qu’ils jugent susceptible de menacer la production agricole. Si les eurodéputés conservateurs du PPE (droite), première force du Parlement, ont échoué la semaine dernière à le rejeter, il fera l’objet d’un vote serré en séance plénière en juillet, au risque de compromettre les futurs pourparlers entre États et eurodéputés pour le finaliser.