« On voudrait brouiller le signal environnemental et la dynamique de décarbonation de la France portée par le monde agricole et les transporteurs que l’on ne s’y prendrait pas autrement », réagissent ensemble à l’étude interministérielle publiée le 10 juillet 2025, les producteurs français de biocarburant et de biogaz avec les transporteurs, les utilisateurs de fret et les agriculteurs de la Fédération des oléoprotéagineux (Fop).

Dans un communiqué posté sur LinkedIn le 29 juillet 2025 (1), ils déclarent avoir alerté les pouvoirs publics du côté « partial et déconnecté des réalités du terrain » de ce document de la DGE visant à orienter les choix en matière d’alternatives au diesel.

Le B100 est « la première alternative décarbonée »

Le rapport de la DGE promeut l’électricité comme la seule solution « présentant un fort intérêt environnemental à court et moyen terme » pour le transport routier de marchandises. Les biocarburants tels que le biodiesel B100 — fabriqué exclusivement à partir d’huiles végétales —, l’huile végétale hydrotraitée (HVO) et le biogaz (GNV) sont « injustement » écartées, déplorent les filières concernées. « C’est bien de pousser l’électrique mais on ne peut pas le faire au détriment d’autres énergies », estime Bastien Le Bouhellec, membre du syndicat Esterifrance.

Étant donné l’ensemble des besoins en biocarburants, « il y a de la place pour toutes les énergies », poursuit-il. « Il faut juste les prioriser là où elles sont les plus efficaces », l’intérêt de l’énergie électrique ne faisant aucun doute pour les véhicules légers. En revanche pour le transport lourd de marchandises, « la contribution du B100 ne doit pas être écartée du mix énergétique », alerte Bastien Le Bouhellec.

Face à l’urgence de la décarbonation des transports, les filières du B100 et du biogaz pointent l’efficacité et la compétitivité de leur énergie alternative, déjà installée chez les transporteurs de marchandises. « Le B100 est aujourd’hui la première alternative décarbonée au gazole fossile pour le transport lourd », soulignent les acteurs, car cette énergie « est économiquement accessible et parfaitement alignée avec la trajectoire de décarbonation définie par les pouvoirs publics. »

Des « biais et omissions »

Et l’impact décarbonant de ce biocarburant est bien réel. L’étude de la DGE indique elle-même une diminution de 66 % des gaz à effet de serre permise par le B100 français par rapport au diesel classique. En conclure donc que le carburant agricole B100 n’offre « aucun potentiel décarbonant significatif à l’échappement ou sur le cycle de vie » comparativement au diesel fossile est tout simplement « intenable » pour la filière du B100 qui dénonce « les biais et omissions méthodologiques graves » de cette étude pour laquelle elle n’a d’ailleurs pas été consultée.

Les acteurs du biocarburant réfutent par exemple « l’hypothétique effet de vase communicant » qui, selon l’étude interministérielle, conduirait à une hausse du biodiesel importé pour les besoins du gazole routier. C’est de plus un comble pour la filière française des huiles et protéines végétales qui dit appeler depuis des années les autorités à contrôler ces importations de biodiesel « inondées de produits frauduleux en provenance de la Chine ».

Un débouché pour 100 000 agriculteurs

Issu de colza cultivé, récolté et transformé en France, le B100 offre un débouché « stable et rémunérateur à plus de 100 000 agriculteurs français », rappelle aussi la Fédération des producteurs d’oléoprotéagineux. Il représente pas moins de 20 000 emplois dans les territoires.

Enfin, il constitue un levier majeur dans la reconquête de la souveraineté de la France en protéines puisque « 1 litre de B100 coproduit environ 1,7 kg de protéines pour les élevages français », chiffre la filière du biocarburant. Discréditer le débouché énergétique du B100 « revient à remettre en cause la part d’autosuffisance que la filière a permis de reconquérir » en réduisant la dépendance des élevages aux importations de tourteaux de soja.

Les filières du B100 et du biogaz demandent « un réexamen concerté » de l’approche de la DGE.

(1) Les signataires du communiqué : le syndicat français des producteurs de biodiesel Esterifrance, la Fédération nationale des transports routiers (FNTR), l’Association des utilisateurs de transport de fret (AUTF), France Mobilité Biogaz, l’Organisation des transports routiers européens (Otre) et l’Ufip-Energies et mobilités.