Dans le cadre du plan national de recherche et d'innovation (PNRI), l'Institut technique de la betterave (ITB) évalue l'intérêt des plantes compagnes dans les cultures de betteraves vis-à-vis de la lutte contre les pucerons verts. Graminées ou légumineuses sont implantées un peu avant ou au moment du semis des betteraves. Leur présence aurait une action répulsive sur les ravageurs. Perturbations olfactives ou visuelles? Attraction d'auxiliaires? Le mode d'action est encore flou.

Quoi qu'il en soit, après des premiers résultats encourageants durant la campagne de 2020-2021, l'ITB a reconduit cette année ses travaux. Au total, 50 essais sont exploitables, avec des gammes de pression puceron très variées. Les analyses de données ne sont pas encore finalisées, mais les premiers enseignements peuvent être tirés.

Certaines modalités ont ainsi permis de réduire la population de pucerons. L'ITB indique ainsi que "sur la moitié des essais, l'avoine rude et l'orge de printemps ont permis de réduire significativement le nombre de pucerons verts par betterave, et le nombre de betteraves touchées". En revanche, la technique ne permet pas à elle seule de rester en dessous de 1 individu pour 10 pieds, le seuil d'intervention aphicide. La technique a également été testée avec de la féverole, de la vesce, du fenugrec et en mélanges, mais la plupart des légumineuses montrent une sensibilité trop marquée au programme de désherbage de la betterave.

Pas encore acté

"En 2021, nous avons eu deux situations intéressantes sur des essais sans protection aphicide, où la réduction de la population de puceron a conduit à une diminution des symptômes de jaunisse, sans engendrer de concurrence", indique Paul Tauvel, responsable agronomique de l'institut technique. Pour considérer que la technique puisse avoir un réel intérêt, ce qui est "loin d'être acté" selon lui, il faudra notamment que l'analyse des rendements de 2022 montre "que l'on retrouve bien des situations où la concurrence n'a pas été trop importante".

Si tel est le cas, "la question sera ensuite de savoir dans quelles situations on sollicite cette technique". Elle est en effet risquée, notamment vis-à-vis des créneaux disponibles pour détruire les plantes compagnes et éviter la concurrence. "L'année dernière, la protection aphicide autorisée aurait pu être suffisamment efficace dans de nombreuses situations expérimentées", précise-t-il.

En complément

"On sait aussi qu'il serait beaucoup trop risqué de mobiliser cette technique seule", indique Paul Tauvel. Il souligne en revanche que dans certaines situations, les niveaux de réduction de population sont intéressants. Bien que l'effet des plantes compagnes soit moins important qu'un traitement phytosanitaire, "il s'applique dès que la plante compagne est en place", précise-t-il. Cela pourrait ainsi être un coup de pouce en complément des traitements phytosanitaires dans des contextes difficiles. "Il faudait que l'on soit capable d'anticiper ces situations où la protection aphicide ne suffirait pas, et de déterminer si les plantes compagnes pourraient avoir un intérêt", juge-t-il.