Les États membres peinent à se positionner sur les orientations de réforme que leur a proposées la Commission européenne en novembre dernier. Les réunions d’experts s’enchaînent à un rythme soutenu. Et les projets de textes de compromis politiques parlent de tout sauf du cœur de la Pac et de ses objectifs. Que veut l’Europe pour l’avenir de son agriculture et de ses agriculteurs ? Quelles visions, quelles orientations pour relever les défis de la durabilité, de la volatilité, de la concurrence mondiale et de l’investissement ? Cela ne fait tout simplement pas partie des débats pour le moment.

L’Europe s’occupe de la périphérie de sa Politique agricole commune. Quel sera le rôle des États membres ou de la Commission en matière d’audit et l’avenir du « Système intégré de gestion et de contrôle » ? Quelle marge de manœuvre sera laissée pour définir telle ou telle mesure environnementale sans remettre en cause l’intégrité du marché intérieur ? Quels indicateurs mettre en place pour bien vérifier du niveau de performance de la Pac elle-même, et le cas échéant procéder à des pénalités budgétaires ? Comment seront rédigées et comment seront validées les potentielles « stratégies nationales » que propose Bruxelles ? C’est sur ces questions que se passe l’essentiel des pourparlers sur ce que devrait être la Pac après 2020. Rien, à ce stade, sur l’équilibre entre les outils actuels de la Pac et leur avenir. Tant que l’inconnue budgétaire reste de mise, aucun débat sérieux ne peut être engagé sur un quelconque dossier ayant un impact financier.

Dès lors, les États membres s’en tiennent à un exercice de style. La Pologne, le Portugal et les Pays baltes insistent sur le nécessaire rattrapage budgétaire au profit de leurs agriculteurs – la convergence. Quelques pays, autour de la France, demandent d’insister sur l’importance des paiements couplés. Quant au Danemark, à la Suède et aux Pays-Bas, ils bataillent contre toute formulation d’une ambition pour l’avenir du budget de la Pac. La présidence bulgare, aux commandes jusqu’au mois de juin, arrondit les angles pour que chacun puisse signer sans trop engager le Conseil et les ministres qui devront endosser le futur texte de prise de position.

Au final, le consensus le plus clair se dégage sur la question de la simplification. Cette simplification doit se faire au profit des agriculteurs et des administrations nationales, s’accordent à dire les États membres, qui s’inquiètent des risques de fragmentation du marché intérieur. Mais cette simplification est-elle vraiment ce qui permettra de relancer l’agriculture européenne, de lui faire franchir le cap de la transition des systèmes agronomiques ?

Rien n’est moins sûr, et ce d’autant moins que, contrairement à tous les usages et obligations procédurales en usage, aucune étude d’impact n’a été réalisée par la Commission, avant de lancer les premières orientations de réforme.