Cet été, les prairies grillées ont obligé les éleveurs à rassembler les animaux sur de petites parcelles autour d’un râtelier ou à l’intérieur des bâtiments. Ce scénario devrait se renouveler souvent et concernera de nombreuses exploitations. « En 2050, plus de la moitié des stocks de fourrages seront distribués en dehors de l’hiver, soulignait Jacques Capdeville, de l’Institut de l’élevage lors du Space à Rennes, le 12 septembre dernier. Le bâtiment n’est plus seulement un abri pour l’hiver, il doit être fonctionnel pour accueillir les animaux confortablement l’été, surtout pendant les heures les plus chaudes. »
Chasser l’humidité
Le défi n’est pas simple à relever, car les constructions sont de plus en plus grandes. « Si, dans les années quatre-vingt-dix, les bâtiments standard mesuraient 15 à 20 m de large, ils atteignent aujourd’hui 25 à 30 m, des dimensions peu favorables à une bonne ventilation ! », constate Jacques Capdeville.
La priorité est de chasser l’humidité qui stagne dans le bâtiment, car c’est une porte ouverte à la prolifération des agents pathogènes. C’est aussi une cause de dégradation et de vieillissement prématuré des charpentes en bois. « L’objectif est de renouveler l’air, sans perturber le confort des animaux », poursuit l’expert. Il est important que ces derniers expriment pleinement leur potentiel de croissance ou de production pour assurer la rentabilité de l’exploitation.
Le vent, précieux allié
« Aujourd’hui, ce qui fait fonctionner une ventilation naturelle, c’est le vent », insiste Jacques Capdeville. Il rentre par un long pan et ressort par l’autre, si la distance n’est pas trop grande. L’effet cheminée vient en appui, en fonction de la hauteur au faîtage et du volume du bâtiment (voir l’infographie ci-dessous). Lorsque le volume est trop grand, l’air chaud monte mais refroidit avant d’atteindre le faîtage. Attention aussi aux faîtières mal posées par le charpentier. Cela peut nuire au bon « fonctionnement » de la stabulation, et engendrer des mortalités plus importantes sur les animaux les plus fragiles. Faire appel aux compétences d’un maître d’œuvre de la conception à la réalisation du chantier évite ces désagréments, et l’investissement est parfois vite amorti.
Les brise-vent sont donc de précieux partenaires, sur une stabulation bien exposée (lire l’encadré). « Avant que ces “outils” existent, les bâtiments étaient positionnés derrière un bois ou à l’abri d’une autre construction, souligne Jacques Capdeville, mais ce sont des configurations à bannir. Il faut utiliser le vent comme un allié et pas comme un agresseur. »
Par ailleurs, la notion de vent dominant n’existe plus. « L’analyse des données météo pour un site donné montre qu’au cours d’une année au moins, trois orientations principales sont enregistrées, et cela presque partout en France », déclare l’expert. Aujourd’hui, dans l’Ouest, le vent froid de nord-est peut souffler pendant deux mois en hiver. Sur l’année, il est aussi présent que les vents de sud-ouest, qui étaient majoritaires autrefois. Un bémol toutefois pour les situations en fond de vallée, où le relief dirige les vents et la rose des vents peut être différente.
Ne pas créer d’obstacle
L’environnement immédiat de la stabulation doit être pris en compte. Les autres constructions ou un talus installé lors du terrassement modifient complètement la circulation de l’air. « Et cela peut hypothéquer tous les calculs », assure Jacques Capdeville. Un hangar construit à proximité de la stabulation peut avoir un impact catastrophique sur un bâtiment qui fonctionnait bien initialement.
Été comme hiver, la stabulation doit donc respirer en aménageant les ouvertures qu’il convient. En hiver, on protège les animaux des courants d’air, tout en préservant les échanges sur les quatre faces. Les jeunes animaux les plus fragiles sont davantage « confinés » que les vaches allaitantes ou les vaches laitières, moins sensibles. « Dans certaines zones, conserver une face ouverte est jouable, assure Jacques Capdeville. Même si, dans certains sites continentaux, on doit prendre plus de précautions. »
Des courants d’air l’été
En été, le cahier des charges est complètement différent. On veut toujours évacuer les gaz, mais on cherche surtout à générer des courants d’air pour apporter du confort. « La perception de frais, comme lorsqu’on se poste devant un ventilateur, participe à l’évaporation de la vapeur d’eau sur l’épiderme. Cette vapeur d’eau prélève la chaleur produite par l’animal. Ainsi, une vache dans un courant d’air a un ressenti de température 4 à 5 °C inférieurs par rapport à la température mesurée par le thermomètre. » L’objectif estival est atteint grâce à des ouvertures importantes, avec des rideaux ouvrants ou des bardages amovibles. « Des ventilateurs peuvent être utilisés, si des températures caniculaires sont enregistrées dans certains secteurs. Ailleurs, je les considère comme un palliatif quand la conception initiale n’a pas permis d’arriver à un bon résultat par les ouvertures naturelles. »
L’impact des dômes éclairant l’été mérite d’être considéré, car s’ils apportent une luminosité agréable en hiver, ils représentent une source de chaleur préjudiciable en été.