«Nous achetons nos animaux dans la plus grande ferme d’Europe : la France ! Et nous sommes toujours restés fidèles à cette source d’approvisionnement de qualité », déclare Carlo Ultrocchi, dont le gendre, Piero Ravizza est aujourd’hui à la tête de l’exploitation familiale spécialisée dans l’engraissement des bovins, à Rosate, près de Milan. De 400 têtes en 1974 dans des bâtiments anciens, la structure a évolué par étapes successives vers la production actuelle de 6 000 jeunes bovins par an. Onze bâtiments, représentant 20 hectares de surface de box, offrent 3 000 places d’engraissement. Un douzième est en cours de construction. « Sans enthousiasme, vous ne faites rien ! Ou rien de bien ! » dit sans plaisanter Carlo Ultrocchi. Les broutards achetés auprès de la société Parma France restent en moyenne six mois sur l’exploitation italienne, avant d’être vendus à l’abattoir Inalca.

La culture du maïs a fait de l’Italie du Nord une terre de prédilectionpour l’engraissement des bovins. 270 hectares de l’exploitation lui sont consacrés, pour constituer d’impressionnants stocks d’ensilage et de grain. La ration complète journalière des mâles charolais comprend 10 kg d’ensilage de maïs, 3,2 kg de maïs épi, 3,8 kg de maïs grain, 1,8 kg d’un mélange avec du tournesol et soja, 0,4 kg de paille et enfin 0,25 kg d’intégration vitamine-minéral. Le coût alimentaire, avec plus de 80 % de produits d’autoconsommation, atteint une moyenne de 2 euros par jour et par animal. « Nous achetons des mâles charolais de 450 kilos vifs de moyenne, des femelles limousines et des femelles aubracs croisées avec du charolais, dont les poids oscillent entre 300 et 340 kg. Ces catégories d’animaux, dont la qualité est régulière, correspondent à nos attentes », explique Piero Ravizza. Les GMQ (gains moyens quotidiens) atteignent 1 400 g pour les mâles et de 900 à 1 050 g pour les femelles. Les mâles sont vendus 700 kilos vifs de moyenne, pour des rendements carcasse de 59 à 60 %. Les femelles affichent 500 à 530 kilos vifs à leur sortie, avec des rendements de 55-56 % pour les croisées et de 59-60 % en race limousine.

Sécuriser le débouché

« Le travail d’éleveur est passionnant,affirme Carlo Ultrocchi. Mais la conjoncture en dents de scie est propice à faire chuter le moral, comme le revenu. Quand nous achetons un broutard, nous ne savons jamais combien nous le revendrons six mois plus tard ! Cela rend incertains les investissements auxquels nous sommes confrontés pour survivre dans cette activité. Nous avons choisi une filière dont le débouché est sécurisé. Il est est primordial d’avoir l’assurance que les animaux finis pourront être commercialisés sans délais. » « 80 % des animaux achetés sont intégrés dans des filières », confirme Gian-Pietro Borgogna, directeur commercial de l’exportateur franco-italien Parma France, filiale en animaux maigres d’Inalca. L’abattoir leader du marché italien abat chaque année 275 000 bovins et génisses issus de broutards français. Un partenariat important a été créé en aval de la filière avec Coop Italia, poids lourd des GMS italiennes.

« La pression commerciale est toujours forte. Ce sont les distributeurs qui font le prix de la viande. Ils maintiennent également des exigences élevées en termes de régularité, d’approvisionnement et de qualité. La tendance va vers des poids de carcasses plus légers, d’où une demande croissante en femelles. Leur volonté est de présenter des pièces de viande moins lourdes, donc moins chères pour le consommateur », soulignent les éleveurs.

Séduire le client alors que la consommation de viande est mise à mal par des associations anti-viande virulentes devient aussi un défi permanent en Italie. Après une garantie d’alimentation sans OGM, Coop Italia va plus loin, avec l’objectif d’exiger une filière sans antibiotiques durant les quatre derniers mois d’engraissement. « En tant qu’éleveurs, nous nous adaptons sans cesse aux exigences du marché, mais les prix ne sont pas en face. En 2016, nous avons dégagé une marge négative en engraissement. Les primes et l’énergie produite sur l’exploitation compensent ces pertes. Ce n’est pas normal. » Un méthaniseur installé en 2011 produit 8 millions de kilowattheures (kWh) par an et des panneaux photovoltaïques posés sur trois bâtiments 400 000 kWh annuels.