«Ce que je recherche avec la récupération de chaleur et le chauffage au sol, c’est du confort pour moi et les animaux », confie Philippe Pencher. Aviculteur à Asnières-sur-Vègre (Sarthe), il travaille aussi 150 ha de terres en TCS, dont 110 ha sont irrigués. « Ce système me permet d’économiser l’énergie fossile, d’améliorer mon plan d’épandage et de diminuer la mortalité des volailles », poursuit-il. C’est après un voyage professionnel en Allemagne, en 2013, que Philippe s’est lancé. « J’ai alors cherché un système compatible avec mon exploitation. »
Philippe se lance quelques mois plus tard dans la récupération d’énergie et le chauffage au sol. Il travaille avec Gilles Humeau, de la société Degré Confort. « Nous sommes partis sur une plate-forme de compostage équipée d’un circuit d’eau dans le béton, décrit Philippe. Le fumier sec stationne d’abord 14 jours dans une case. La chaleur y atteint 55 °C, puis la température grimpe à 57 °C pendant 21 jours. »
14 km de tuyaux
Le compost ainsi fabriqué est déplacé en case de maturation. Il y reste trois mois. La case de compostage mesure 8 m de large sur 18 m de long. Celle de maturation fait 12 m de large sur 18 m de long. Chacun de ces espaces est bardé sur trois faces. La chaleur produite chauffe le béton. À l’intérieur de celui-ci est placé un circuit d’eau. Ainsi chauffée, l’eau est dirigée vers le local technique. « Nous avons conservé un équipement de chaudière à gaz de 2 fois 220 kW, précise Philippe. Il nous permet de compléter la demande de chaleur. C’est aussi une sécurité en cas de problème sur la récupération de calories du compost. »
Un système permet le mélange des deux eaux chaudes : celle produite par les chaudières à gaz et celle chauffée par le compost. Pas moins de 60 « départs » envoient ensuite l’eau chaude dans les réseaux circulant dans le béton des deux bâtiments.
Lisier de canard séparé
En tout, 14 km de tuyaux, dont 12 posés, font circuler l’eau. Jusqu’à 45 000 poulets de chair de 34-36 jours sont ainsi chauffés dans chaque bâtiment. Les fumiers de poulets ne sont pas les seuls à être compostés.
Le lisier provenant du second bâtiment à canards est brassé et repris par une pompe. Il est amené vers un séparateur de phase. La partie solide est compostée tandis que la partie liquide est stockée dans une fosse. Elle jouera peut-être un nouveau rôle dans l’augmentation en température du compost. Pour l’heure, c’est de l’eau qui est appliquée en brumisation sur le fumier. Le but est d’élever la température, donc celle du circuit d’eau.
« Au total, le budget s’élève à 1,350 million d’euros. Cela comprend terrassement, béton, bâtiments, séparation de phase, plate-forme de compostage, récupération de chaleur, etc. Les aides se sont révélées minimes : 39 000 euros en tout, de l’Ademe et du conseil général. « Le retour sur investissement est calculé sur quinze ans » annonce Philippe. Le compost est vendu à partir de 25 euros la tonne. « Ça peut être plus, en fonction de la distance à parcourir. Il est de caractéristique 28-12-16 (NPK) brut d’analyse. Au plus loin, nous livrons à 8-10 km. » Au final, la ferme produit 350 tonnes de compost par an. En parallèle, Philippe estime économiser 37 % de gaz, et ce n’est qu’un début.