Trop c’est trop ! Trop d’alertes SMS, de cellules, de difficultés à trouver des pièces, de temps passé à recartographier les mamelles… Parfois, la moindre panne est la goutte qui fait déborder le vase. Sujet encore très tabou mais loin d’être vécu comme un échec, le retour à la salle de traite est une délivrance pour les éleveurs qui prennent cette décision radicale. Image même de la modernité et de l’avance technologique de l’élevage laitier par rapport à d’autres ateliers, le robot de traite a délivré de nombreux éleveurs d’une astreinte de plus de trois heures par jour. Axema estime que près de 4 500 exploitations sont équipées d’un robot de traite, soit cinq fois plus qu’il y a dix ans. Et les ventes continuent de progresser chaque année, dans un contexte économique laitier pourtant difficile.
Le stress, raison principale de l’arrêt du robot
Si les avantages du robot pour la qualité de vie et des conditions de travail de l’éleveur ne sont plus à démontrer, certains producteurs choisissent cependant de faire marche arrière après parfois plus de sept ans avec leur installation robotisée. Quelle mouche a donc piqué ces éleveurs qui choisissent de revenir à une installation de traite classique, et donc de s’imposer à nouveau cette astreinte quotidienne ? Les causes de ce virage à 360° sont multiples, mais l’une d’elles revient quasi systématiquement : le stress. Il est difficile d’admettre qu’une technologie conçue à la base pour simplifier le travail de l’éleveur puisse être la source d’un stress permanent, c’est pourtant la réalité pour certains. Ce mouvement de « dérobotisation » pour cause de stress est né en 2010 aux Pays-Bas, pays pionnier du robot de traite, et il a depuis gagné la plupart des bassins laitiers français.
Un sujet encore tabou
« Tout le monde n’est pas fait pour vivre avec un robot de traite, insiste ce conseiller lait du Grand Ouest. Les alertes qui arrivent jour et nuit par SMS peuvent vite vous pourrir la vie si vous n’arrivez pas à prendre du recul. » À cela s’ajoutent les conséquences sanitaires sur le troupeau dès la moindre panne, qui peut provoquer un arrêt de la traite pendant plusieurs heures et un embouteillage de vaches devant la stalle. Mais abandonner le robot de traite, ce n’est pas comme changer un semoir qui se révèle mal adapté aux parcelles. La plupart des éleveurs qui ont vécu ce bouleversement profond dans leur conduite d’élevage ne souhaitent pas témoigner à visage découvert. Néanmoins, leurs histoires sont proches de celle de Tanguy Paranthoen et Jean-Armand Delaitre, les deux agriculteurs qui ont accepté de partager leur expérience. L’objectif : dédramatiser une situation et un choix radical qui peuvent être vécus comme un échec, mais sont une façon de rebondir pour pérenniser l’atelier lait sur l’exploitation.