En 2002, avec trois vaches, Ivan Danchevi fut le premier éleveur laitier bulgare à entamer une conversion vers l’agriculture biologique. À l’époque où la Bulgarie n’était pas encore européenne et ne disposait d’aucun organisme certificateur national, c’est avec un organisme suisse qu’il s’était embarqué dans l’aventure. « J’ai réalisé que ma façon de faire était déjà très proche de la bio, et on m’a expliqué qu’en bio je pourrais vendre plus de lait et plus cher. C’était une opportunité à saisir », résume Ivan. Seize ans plus tard, les chiffres qu’il annonce semblent lui donner raison : un prix du lait conventionnel fluctuant autour de 0,25 €/l, tandis que le prix du lait bio, fixé à l’époque à 0,46 €/l, est resté stable.
Son élevage s’est bien développé. Il compte aujourd’hui 132 laitières et leur suite, de races holstein, montbéliarde et brune des Alpes. Les 120 hectares d’herbe et de cultures fourragères suffisent, en année « normale », à couvrir les besoins du troupeau. Lequel pâture autant que les conditions météo le permettent, sachant qu’à 630 mètres d’altitude, l’hiver est souvent froid. Avec une production annuelle de 740 tonnes, « l’élevage fournit la majorité du lait bio du pays », sourit Ivan. Il faut dire qu’ils ne sont que trois sur le créneau : lui-même, un autre éleveur et un institut de recherche.
Aides à l’animal
La Bulgarie a bien pris le virage de la bio et compte aujourd’hui dix-sept organismes certificateurs nationaux. Mais les productions animales sont à la traîne. Sur les 7 000 producteurs recensés par les autorités, une trentaine seulement détiennent des animaux. Pour motiver les éleveurs, une aide bio couplée à l’animal (environ 70 € par UGB) a été mise en place dans la programmation Pac 2014-2020, en plus de l’aide aux surfaces fourragères, accordée depuis 2008. Mais seuls les premiers, comme Ivan, ont été servis : la bio a été victime de son succès. À quelques dizaines de kilomètres de sa ferme, des producteurs de rose biologique ont fait les frais de ce dérapage budgétaire. Ils n’ont pas pu souscrire de contrat pour une aide au maintien. « Les enveloppes d’aides ont été consommées en deux ans ! Depuis, aucun nouvel engagement n’est accepté », précise l’éleveur.
Avec l’explosion récente des conversions, l’offre en produits bio croît plus vite que la demande intérieure. L’histoire dira si l’essor de l’agriculture bio bulgare, encore toute jeune, survivra à l’arrêt des subventions.