« Seules nous sommes invisibles, ensemble nous sommes invincibles. » Telle est la devise des Femmes Chefs d’Entreprises (FCE), le premier réseau d’entrepreneuriat féminin en France avec 2 000 adhérentes et 60 délégations. C’est Aude Milesi, présidente de FCE Champagne, qui l’a lancée en tribune à l’occasion d’un débat sur « l’entrepreneuriat féminin en agriculture », le 26 novembre dans les locaux du think-tank Agridées à Paris. « Faire partie d’un réseau permet aux femmes de monter en compétences et de briser la solitude de la cheffe d’entreprise », a-t-elle poursuivi avec enthousiasme et conviction.
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26 % des chefs d’exploitation
Cette journée de débats était l’occasion pour Anne Dumonnet-Leca, présidente de Vox Demeter, et Gabrielle Dufour, responsable de la communication chez Agridées, de présenter une note (1) intitulée « Entrepreneuriat féminin en agriculture : libérer les potentiels ! ». Depuis plus de dix ans, les femmes représentent 26 % des chefs d’exploitation, un taux qui stagne, tout comme leur présence dans les instances de décision. Fruit de 18 mois de concertation et très documentée, la publication présente 44 recommandations pour rendre l’agriculture plus attractive aux jeunes femmes, un enjeu essentiel pour le renouvellement des générations.
Parmi les propositions phares : créer un observatoire de l’entrepreneuriat en agriculture avec des données genrées, centraliser les informations professionnelles pour les femmes sur un site, faciliter l’accès au congé de maternité, instaurer un index d’égalité et lancer un réseau de cheffes d’entreprise agricole.
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Un seuil de 35 % pour peser sur les décisions
« Faire de la place aux femmes dans les instances de gouvernance est un sujet central », a souligné Irène Tolleret, vigneronne. L’ancienne députée européenne a relevé avec enthousiasme les propositions concernant l’instauration d’un index d’égalité en agriculture et de statistiques genrées, « ça marche super bien car cela met en lumière l’historique du patriarcat ».
« Pour la sociologue Rosabeth Kanter, en dessous d’un seuil de 35 %, une minorité ne peut espérer peser sur les décisions de manière significative », indique la publication Agridées-Vox Demeter. Si le recours aux quotas depuis 2013 dans les chambres d’agriculture a permis l’élection de 30 % de femmes, leur place dans les autres structures, notamment les syndicats ou les coopératives, reste confidentielle. « À peine 10 % de femmes siègent comme administratrices dans les coopératives agricoles », poursuit ainsi la note.
La question des quotas en débat
« Sur 2 100 coopératives françaises, seules 18 d’entre elles sont présidées par une femme. Et dans les grosses coopératives, le taux de femmes au conseil d’administration oscille entre 3 et 5 % », a précisé Jérôme Caillé, éleveur et président de Terrena Bio.
En travaillant sur le programme « Tous en coop » et le mentorat, le président de la commission bio de La Coopération Agricole en conclut que « le sujet de la mixité est peu réfléchi au sein des coopératives. Pour beaucoup, ce n’est pas un thème d’actualité. Les quotas sont même vécus comme une menace. » L’éleveur se prononce « plutôt en faveur des quotas à titre personnel », soulignant « qu’à la vitesse où la féminisation avance, beaucoup trop lentement, c’est inévitable ».
(1) À retrouver sur le site https://www.agridees.com.