L’« architecture verte » de la future Pac, proposée par la Commission, commence à trembler sous les coups de boutoir des États membres. Lors du Conseil de l’UE du 18 novembre, toutes les délégations ont réaffirmé leur soutien officiel au « relèvement de l’ambition environnementale de la Pac ». Mais le commissaire à l’Agriculture Phil Hogan a montré qu’il n’était pas dupe.

Un pourcentage global de dépenses pour l’environnement

L’architecture verte pensée par la Commission contient des obligations distinctes pour chaque pilier. Dans le premier, elle repose sur une conditionnalité renforcée, l’instauration d’un « ecoscheme » (programme écologique obligatoirement proposé par les États mais reposant sur un engagement annuel volontaire des agriculteurs), et enfin un minimum de dépenses (20 %) affectées à l’environnement dans les interventions du secteur fruits et légumes. Sur le second pilier, la Commission propose de fixer un minimum de 30 % de dépenses concourant à la réalisation des objectifs climatiques et environnementaux.

La présidence finlandaise du Conseil de l’Union européenne (UE) suggère de tout chambouler. Notamment de fixer un pourcentage minimal de dépenses pour l’environnement et le climat qui englobe les deux piliers. Ce pourcentage serait fixé après l’adoption du budget de l’Union européenne.

Un catalogue d’interventions très élargi

Globalement, la proposition de pourcentage unique a été bien accueillie, y compris par la France. Quant à la liste d’interventions pouvant être comptabilisées comme dépense « environnementale », les délégations n’ont pas tari de propositions. Outre les mesures environnementales, le soutien à la bio, l’ecoscheme et les investissements non productifs en faveur de l’environnement, plusieurs d’entre elles ont proposé d’y inclure l’ICHN, les dépenses liées aux zones Natura 2 000 et celles liées au respect de la directive-cadre sur l’eau, mais aussi une part des DPB au titre du respect de la conditionnalité renforcée, et pourquoi pas certaines pratiques comme le chaulage

Les États choisiraient une ou plusieurs mesures leur permettant d’atteindre le pourcentage visé. Autant dire que les États ayant beaucoup de zones défavorisées n’auraient plus beaucoup d’efforts à faire… Nombre d’entre eux, en tout cas, renonceraient à consommer l’enveloppe du premier pilier pour financer un ecoscheme — la question de le rendre ou non obligatoire pour les États divise déjà le Conseil depuis le début des débats. Et ils pourraient décider de favoriser franchement la modernisation au détriment des mesures environnementales au sein du second pilier.

Verdissement ou greenwashing ?

Pour toutes ces raisons, la proposition de la présidence « ne peut qu’abaisser notre niveau d’ambition environnementale », s’est désolé Phil Hogan, s’alarmant du risque de « greenwashing ». Sans même parler de la demande, portée par certains États membres, d’exempter les petites fermes de contrôles conditionnalité.

B. Lafeuille