Se questionner

Nous entendons les critiques sur le modèle coopératif, y compris en interne. Nous ne sommes pas enfermés dans une tour d’ivoire. C’est le moment d’appeler aux évolutions. Il ne s’agit pas de remettre en cause nos fondamentaux, mais de créer un espace de questionnement au regard du développement du numérique, de l’évolution de la société, des attentes des jeunes agriculteurs…

Revoir nos relations

Notre système démocratique est interrogé, le niveau d’exigence a monté et nous devons répondre à tout cela. Nous commençons ainsi des travaux sur la relation avec les adhérents, notamment dans les très grandes coopératives. Même si le gouvernement considère qu’il faut encore ajouter des couches, cela nous paraît davantage être une question de pratique et de mise en œuvre qu’une question législative. Peut-être faut-il penser à une nouvelle approche pour mieux associer les coopérateurs aux décisions, mieux faire partager les stratégies, mieux expliquer les ambitions, la manière dont on répartit l’excédent libéré par la coopérative, comment on se situe par rapport au marché… Les outils numériques vont pouvoir nous y aider.

Débattre sur le terrain

Nous allons par ailleurs lancer un grand débat coopératif cette année, qui va démarrer au Salon de l’agriculture. Il s’appuiera sur une tournée en régions auprès de nos entreprises, pour discuter avec elles de leurs stratégies et des évolutions en cours. Nous ouvrons également un site internet de consultation pour interroger nos agriculteurs et nos salariés sur le modèle coopératif, leurs attentes, leurs difficultés… Et pour encourager les coopératives à s’ouvrir davantage à la société civile, nous allons créer au sein du conseil d’administration de Coop de France un comité « société et environnement » où nous inviterons des responsables d’ONG, d’associations, des élus, des sociologues…

Coopérer au bien commun

La société et les politiques s’interrogent aujourd’hui sur le rôle des entreprises vis-à-vis des services qu’elles rendent, au-delà de leur propre intérêt. Nous voulons nous inscrire dans cette dynamique. Il y a une difficulté particulière nous concernant : on attend parfois des coopératives un rôle d’intérêt général en matière économique, sans doute au-delà de ce qu’elles sont en mesure de faire. Beaucoup de syndicats nous demandent pourquoi elles n’aident pas à redresser les marchés agricoles quand il y a des difficultés. Certes, elles peuvent coopérer au bien commun, mais elles ne peuvent pas aller au-delà du mandat qui leur est donné, qui est de travailler en premier lieu pour leurs adhérents. Les coopératives ne sont pas un outil de régulation des marchés ! Nous devons trouver un équilibre entre le rôle que nous pouvons jouer pour la société et la défense de nos intérêts en tant qu’entreprise, dans un monde économique extrêmement dur. Il faut pour cela redynamiser nos modèles. L’idée est d’écouter les agriculteurs-coopérateurs et les salariés, et de nous repositionner par rapport aux attentes de la société. Il s’agit de passer à l’offensive pour répondre aux critiques et de redonner du sens à l’engagement coopératif.

Propos recueillis par Alain Cardinaux