En 20 ans, le nombre de coopératives agricoles a été divisé par deux. La raison ? Une multiplication des regroupements, fusions et acquisitions d’entreprises non coopératives, a expliqué Pascal Viné, délégué général de Coop de France, lors d’une conférence organisée à Paris le 8 décembre 2016. Il faut s’y habituer : la croissance externe est devenue un objectif prioritaire des coopératives agricoles.

Terrena, dont le siège est dans le Loire-Atlantique, a ainsi pris le contrôle majoritaire du groupe Doux en mars dernier. Autre exemple avec la fusion des sept coopératives de base d’Eurial dans Agrial, ou encore avec Vilmorin, filiale du groupe coopératif Limagrain, qui a acquis l’entreprise californienne Genica Research Corporation. En tout sur l’année 2016, on compte 67 opérations, dont 22 pour les seuls mouvements entre coopératives. Soit un volume de chiffre d’affaires dépassant le milliard d’euros.

Faible taux de marge

Michel Prugue, président de Coop de France, voit dans ce phénomène un réflexe salutaire pour « s’adapter à l’évolution des marchés et à l’accroissement de la concurrence internationale ». Il faut dire que le bilan économique des coopératives en 2015 n’est guère brillant. Si elles présentent un chiffre d’affaires de 86 milliards d’euros et un résultat net global de 1 milliards d’euros, leur taux de marge (EBE/CA) reste bien inférieur à la moyenne nationale : 3,87 % (0,78 % en bétail et viande !). C’est moins que dans les secteurs de la communication (17 %), des services financiers (15 %) ou de l’aéronautique (9 %). Et guère plus que celui de la construction automobile (3,4 %).

Ce n’est pas dans la cour de ferme que l’on gère les enjeux internationaux !

Pascal Viné

Selon Pascal Viné, cette rentabilité « insuffisante » traduit « les contraintes qui pèsent sur des entreprises ancrées sur les territoires ». Coop de France veut d’ailleurs profiter de l’élection présidentielle pour revendiquer un traitement fiscal et juridique adapté aux coopératives. Maintenir l’exonération de l’impôt sur les sociétés, bien sûr, mais aussi prévoir des allègements de charges, un assouplissement des normes et une simplification des procédures. Sinon, « nous allons nous retrouver en situation de distorsion de concurrence par rapport à d’autres entreprises privées », prévient son président.

Dans ce contexte, Michel Prugue a aussi reconnu la nécessité d’adapter les relations entre coopérateurs et coopératives. Un sujet capital, tant les systèmes de gouvernance peuvent être décriés en période de crise… Comment promouvoir le développement international et la croissance externe sans se couper de sa base ? La question méritera d’être posée lors du congrès de Coop de France, qui se tiendra à Paris le 14 décembre 2016. Même si en la matière, comme l’a rappelé Pascal Viné, le contexte mondial impose sa loi : « Ce n’est pas dans la cour de ferme que l’on gère les enjeux internationaux ! »

Alain Cardinaux