Il existe des limites au stockage du carbone. D'abord, physique puisqu'on ne peut pas le stocker indéfiniment dans le sol. Puis il y a un plafond, même s'il est différent selon le type de sol, la granulométrie, la présence de carbonates, le climat...
Ainsi, en France, on constate que certains sols sont déjà « saturés », comme les zones herbagères du Massif central ou en Bretagne, où il y a des apports réguliers de matière organique. En revanche, « les plaines du Bassin parisien, la vallée de la Garonne et le pourtour méditerranéen, qui connaissent des restitutions en carbone plus faibles, représentent des zones de stockage potentielles », note Sylvain Pellerin, de l'Inra.
SUR LE LONG TERME
Mais attention, ces stocks sont réversibles. Un retournement de prairie, par exemple, libère du carbone et diminue le stock. « Il faut maintenir la pratique stockante si on veut entretenir le niveau dans le sol, », confirme Claire Chenu, enseignante-chercheuse à AgroParisTech. Autre point, si on peut cumuler les pratiques favorables au stock, l'estimation du carbone capté pour chaque pratique n'est en revanche pas additive. Il est donc parfois difficile de faire une évaluation réelle sur une parcelle.
Les stocks évoluent également très lentement et peu. « Il faut au moins cinq ans, si ce n'est dix, pour voir une petite hausse due à un changement de pratiques, note Claire Chenu. La variation lente et souvent faible constitue des freins à une rétribution financière de ce service à l'agriculteur, basée sur un résultat comme la hausse du stock de carbone.
Par ailleurs, le suivi de ce stock coûte encore cher, mais avec le développement d'outils moins coûteux et plus rapides (capteurs, drones...), des mesures incitatives liées au résultat restent envisageables ! »
Pour l'instant en tout cas, une rétribution vis-à-vis des moyens employés est le plus plausible : plantation de haies, gestion des prairies, bandes enherbées... C'est déjà ce qui est un peu fait dans la nouvelle Pac avec les surfaces d'intérêt écologique. Sauf que l'objectif d'atteindre 5 % de la surface en terres arables en SIE est obligatoire pour être éligible au paiement vert. Mais des mesures agro-environnementales sur la fertilité du sol de cinq ans voire plus pourraient être mises en place, avec une prime à la clé. Le système de compensation volontaire représente également un moyen de monétiser les pratiques favorables au stockage (lire l'encadré).