Emmanuel Lavier est installé en Gaec avec son frère sur 300 ha sur le plateau de Langrois à Etormay, en Côte-d'Or. Il partage son temps entre les travaux des grandes cultures semées intégralement sous couvert végétal et le développement de Gephymat, un outil informatique qu'il a créé afin d'aider les producteurs à maîtriser la vente de leurs grains.
Emmanuel termine ses étude d'ingénieur agricole à l'Institut supérieur d'agriculture de Beauvais (Isab) en 1998 mais garde contact avec son professeur d'informatique. Deux ans plus tard, il crée Estalis, une société d'informatique. « En 2007, je cherchais à créer un nouveau logiciel. En pleine période de flambée du prix des grains, l'idée m'est très vite venue de concevoir un outil destiné à faciliter la gestion de la vente des céréales par les agriculteurs », se rappelle le jeune entrepreneur. Le projet a émergé d'autant plus rapidement qu'Emmanuel était déjà sensibilisé à la mise sur le marché de sa production.
« En 2003, nous avons vécu une première période de volatilité sur le marché des céréales, avec des prix dépassant les 160 E/t. Je me suis alors rendu compte que je prenais des décisions de vente sans savoir réellement pourquoi. Un constat qui m'a amené à créer avec des collègues un groupe de réflexion sur les marchés, qui perdure encore aujourd'hui. »
Une partie d'autofinancement et un crédit « Projet innovant », accordé par Oseo, ont permis de recruter deux personnes au sein de la société Estalis et de développer le produit. « A l'inverse des autres logiciels de gestion de l'exploitation, Gephymat part du principe que la composante du revenu la plus volatile, c'est le prix de vente, les charges étant déjà à peu près bien appréhendées avant la récolte », note Emmanuel.
Guider les choix
Quel sera l'impact sur mon revenu si je vends aujourd'hui 30 % de ma récolte de blé ? Quel sera le manque à gagner si les prix montent par la suite ? Dans quelle mesure l'achat de telle ou telle option (assurance à la hausse ou à la baisse) me permet de me protéger des évolutions futures des cours ? Gephymat a été conçu pour répondre à toutes les questions qui se posent aux agriculteurs quant à leurs choix de commercialisation.« Le logiciel permet de savoir, à un instant donné, où en est la vente des grains de l'utilisateur. En simulant l'impact des décisions envisagées sur le revenu final de l'exploitation, il met celles-ci en perspective avec différents scénarios d'évolution des prix. C'est un réel outil d'aide à la décision ! » se félicite Emmanuel Lavier. Le service est commercialisé depuis 2009. « Même si le produit est bon, il est très difficile de le vendre sans notoriété. J'ai d'abord élaboré un partenariat avec un mensuel agricole aujourd'hui disparu (Mag Cultures) pour promouvoir le logiciel directement auprès des agriculteurs. Désormais, ma stratégie de vente est résolument tournée vers des partenariats avec les organismes stockeurs, afin qu'ils proposent ce service à leurs adhérents, tel que je le fais aujourd'hui avec la coopérative Dijon céréales, observe Emmanuel. J'ai la chance d'avoir un produit tout prêt, alors même que le contexte est porteur. Avec le regain de volatilité depuis l'été 2010, tous les agriculteurs voudraient avoir une meilleure visibilité sur leurs revenus à venir. »
Accès à distanceLe service est accessible via une simple connexion Internet sur www.gephymat.com, permettant une plus grande mobilité d'utilisation et l'assurance de ne pas perdre ses données en cas de panne d'ordinateur. |
La coopérative Dijon Céréales développe ce service« Les producteurs peuvent se sentir perdus face au marché et hésitent à se positionner alors même qu'ils sont parfois largement rentables. Gephymat devra permettre à nos adhérents qui le souhaitent d'évaluer leurs prix de revient et d'élaborer une stratégie de vente, les aidant à prendre des décisions », explique Loïc Arnoud, responsable Marchés à terme de la coopérative Dijon céréales. L'idée étant notamment d'éviter des situations comme celles de 2008 où certains producteurs ont trop attendu pour vendre et ont subi « l'effet ciseau » des prix. |