«Des négociations épouvantables », qui se sont déroulées dans un « climat violent » : les industriels laitiers ne mâchent pas leurs mots pour qualifier leurs discussions commerciales avec les distributeurs, conclues fin février.
Une part d'esbroufe, un jeu convenu qui accompagne toute négociation ? Sans doute. Mais pas seulement.
Cette année, la plupart des industriels ont dû concéder des baisses sur les produits sortie usine ou, au mieux, leur reconduction, face aux centrales d'achat. Avec de tels résultats, le deuxième trimestre s'annonce difficile pour le prix du lait à la production.
Face à la menace, la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) revient aux bases du combat syndical. « Les indicateurs montrent une amélioration du marché. L'accord du 3 juin doit s'appliquer, martèle Gilles Psalmon, son directeur. Notre problème, ce ne sont pas les écarts de compétitivité entre industriels. Notre problème, c'est le revenu des producteurs. Vivre avec 750 € par mois – ce qu'ils ont eu en 2009 – ce n'est pas tenable. »
Hausse d'environ 5,5 %
Selon l'accord, les producteurs pourraient réclamer une hausse d'environ 5,5 % (soit 15 €/1 000 l) au deuxième trimestre par rapport à l'an dernier, sur la base d'une grille de prix récrite. Le prix du lait tournerait alors autour de 250 €/1 000 l (1), soit 30 € de plus qu'en 2009.
Sur l'ensemble de l'année 2010, l'objectif de la FNPL serait d'atteindre 290 à 300 €/1 000 l en prix de base moyen, à peu près ce qui a été obtenu en 2009. Seulement, cette posture sera difficilement tenable face à des industriels qui ne jurent que par l'écart de compétitivité avec l'Allemagne.
« On ne peut pas rester décalé par rapport à l'Allemagne sur le lait de consommation, l'emmental et les produits industriels, explique Jehan Moreau, directeur de la Fédération nationale des industries laitières. Il est hors de question pour les transformateurs de revivre 2009. »
Le prix du lait en France était resté largement supérieur à celui outre-Rhin, ce qui avait valu aux industriels de perdre des marchés.
De plus, alors que la fin d'année 2009 laissait espérer une nette reprise, un début 2010 laborieux a douché l'optimisme, malgré la bonne orientation des marchés mondiaux. La tentation est grande de dénoncer l'accord sur le prix du lait. Auquel cas c'est l'interprofession entière qui risque l'implosion. Les industriels oseront-ils enflammer l'allumette ?
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(1) Valeur indicative. En réalité, les prix diffèrent d'une région à l'autre.
Les industriels ont-ils besoin de volumes supplémentaires ?Une hausse des quotas de 1 % sur la prochaine campagne, à laquelle s'ajouterait le 1 % gelé en 2009-2010, devait se décider le 18 mars lors du conseil lait de FranceAgriMer. « Ce serait une erreur stratégique de ne pas les attribuer, face aux pays d'Europe du Nord qui, eux, produisent tout leur quota », estime un observateur. Mais les industriels ont-ils besoin de ces volumes supplémentaires, eux qui n'en ont pas voulu l'an dernier ? « La réponse est non, si ce lait est acheté au même prix qu'en 2009, répond Jehan Moreau. En revanche, s'il est payé au prix allemand, alors les industriels pourront utiliser ces volumes pour reconquérir les parts de marché perdues l'an dernier. » |