Parcours atypiques dans le milieu agricole, Roland et Sophie Moissette ont eu, tous les deux, des parents fonctionnaires dans le Midi de la France. A leur compte depuis 2001 à Lavau, dans l'Yonne, ils ont repris une ferme laitière en rachetant le fond et le cheptel. «Dès l'âge de dix ans, je venais l'été voir mon oncle producteur de lait en Puisaye. Le métier, l'environnement et les animaux m'ont toujours plu. C'est grâce à lui que nous nous sommes retrouvés dans l'Yonne», explique l'éleveur.
Engagé dans le génie parachutiste, Roland Moissette avoue être « incommandable ». Il décide de changer d'orientation, devient salarié chez son oncle agriculteur et passe un bac professionnel en deux ans d'apprentissage. «Je me suis installé une première fois en succédant au père dans un Gaec père-fils. Mais ce ne fut pas ce que j'attendais sur le plan des relations humaines», confie-t-il. Au bout de trois ans, Roland décide de rechercher une exploitation individuelle. «Je ne suis pas un suiveur. J'aime être mon patron», commente l'éleveur, qui privilégie l'indépendance du travail d'agriculteur.
Formation accélérée
A vingt-neuf ans, Sophie se lance dans une formation à temps plein pour passer le bac agricole. « Je mettais mes deux enfants à la crèche à 8 heures et je les récupérais à 19 h », raconte-t-elle. Le cumul des parts sociales du Gaec restituées au départ de Roland et les prêts JA de Sophie vont servir à acheter une exploitation laitière de 80 hectares pour un coût de 450 000 euros, dont 180 000 € de foncier, 60 000€ pour les bâtiments, 60 000 € pour le cheptel, 60 000 € pour le matériel et 90 000 € pour la maison. « Nous avons récupéré une ferme à un prix accessible, mais avec beaucoup de travail derrière afin d'obtenir un outil performant », explique Roland Moissette. Avec 280 000 litres de quota, l'exploitation qui n'était pas aux normes n'était pas viable en l'état. Le couple obtient dès la reprise 100 000 l, puis 50 000 l supplémentaires pour faire face aux lourds investissements, achète une trentaine de vaches et double rapidement le cheptel. En 2005, un nouveau bâtiment à logettes de 70 places avec une salle de traite voit le jour. L'investissement est de 350 000 €.
L'endettement de Roland et Sophie est important. Les parents les ont aidés en apportant 15 000 €. Le foncier et la maison ont été financés sur dix-huit ans, le bâtiment d'élevage sur quinze ans et le reste sur cinq ans.
Vivement 2008
Au bureau, Sophie s'occupe de la comptabilité, des factures et du courrier. Roland se charge de la gestion administrative, qu'il juge envahissante: «Ce n'est pas l'image que je me faisais du travail de l'agriculteur sur sa ferme.» Mais il est passionné par son métier. Cuma et groupement d'employeurs lui ont permis de faire connaissance avec d'autres collègues de son secteur. Roland se sert du matériel de culture en Cuma avec les céréaliers du voisinage et fait appel aux entreprises pour la récolte du maïs ensilage et de l'herbe.
«Travailler en couple n'est pas toujours évident, confie Sophie. Au début, compte tenu de l'énorme travail et la fatigue, la vie de famille en a pris un coup. » Il a fallu s'adapter au climat de la région et à l'éloignement des commerces et des services. Mais elle parle aussi d'«intégration» dans sa nouvelle activité et dans l'environnement rural. «J'ai toujours aimé les animaux. Je trouve le travail auprès des bêtes agréable.» Sophie trait les vaches le soir. Et les relations avec l'entourage se sont développées et consolidées au fil des années.
Un salarié pendant trente joursAprès avoir adhéré les premières années au service départemental de remplacement, l'exploitation fait aujourd'hui partie d'un groupement d'employeurs du canton. « Le système nous convient. Le planning des trois salariés est établi tous les deux mois. Le nôtre, qui vient une trentaine de jours par an, connaît notre ferme. Il n'est plus nécessaire de tout lui réexpliquer à chaque fois », précise le couple qui prend deux semaines de vacances par an et quelques week-ends pour souffler un peu. |