Onze élevages normands en agriculture biologique (AB) pratiquant la monotraite depuis au moins deux ans ont été enquêtés en 2024. « La production laitière est réduite en moyenne de 27 % », souligne Olivier de Carville, chargé de projet en élevages autonomes du réseau des Centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (Civam) normands. La règle d’or, c’est d’avoir « une ration économe et herbagère », complète Camille Lecuyer, conseillère en élevage de bovins AB de la chambre d’agriculture de la Normandie. Elle insiste sur le caractère réversible de ce choix à tout moment.

En moyenne, les exploitations étudiées cultivent 100 hectares et intègrent 99,7 % d’herbe dans les rations alimentaires. Les effectifs de 74 vaches laitières pâturent 301 jours par an. La productivité de ces élevages, dont neuf pratiquent la monotraite annuelle, est de 3 515 litres par vache. Trois d’entre eux sont en race normande, un en jersiaise et sept élèvent des prim’holsteins croisées dont quatre kiwis (1).

Prévenir les risques de santé

Le premier avantage, selon Olivier de Carville, concerne le confort de travail : « La soustraction d’une astreinte journalière génère de la souplesse. » Camille Lecuyer ajoute que « la quantité de travaux délégués diminue généralement ainsi que les charges associées ». Certains éleveurs cherchent à limiter leurs risques de santé comme les troubles musculo-squelettiques, d’autres développent un autre atelier. Les éleveurs normands évoquent aussi des remplacements facilités.

De 25 % en moyenne, les pertes de production peuvent aller jusqu’à 40 % dans le cas de primipares. Si la qualité du lait progresse de 4,3 g/kg en taux butyreux (TB) et 3,2 g/kg en taux protéiques (TP), l’augmentation du prix du lait ne compense pas la baisse de volume. « Il convient de démarrer avec un troupeau sain autour de 200 000 cellules/ml », souligne la conseillère. L’accroissement est couramment de 60 000 cellules/ml. Le chargé de projet relève que la sélection est ainsi souvent modifiée.

La consommation alimentaire diminue de 5 à 10 %. « L’état des animaux apparaît globalement plus favorable avec de meilleures performances de fertilité et fécondité », note Camille Lecuyer. Les poids de carcasse des réformes sont légèrement supérieurs. Par ailleurs, les problèmes de pattes sont globalement en recul grâce à la limitation des temps d’attente stationnaire et des passages dans les chemins. Dans de nombreux cas, la monotraite facilite en outre la valorisation des parcelles éloignées jusqu’à un kilomètre en moyenne.

À la suite à ces enquêtes, Camille Lecuyer recommande « de s’engager dans cette pratique quand la situation économique est sécurisée ». Une bonne anticipation des besoins en trésorerie est également judicieuse. Elle indique : « Un système herbager limitant l’achat d’aliment et la part de maïs est indispensable en cas de monotraite annuelle. »

(1) croisement prim’holstein et jersiaise.