Angleterre en 2009 et Nouvelle-Zélande en 2011 : par deux fois, Philippe Bouard et Maryline L’Helguen sont partis explorer d’autres modèles d’élevage herbagers. Ils y piochent des idées pour nourrir la stratégie de leur exploitation, le Gaec des Camélias, à Plogastel-Saint-Germain. Philippe et Maryline ne sont que deux pour mener 90 laitières, sur une exploitation de 110 ha découpée en deux sites éloignés de 60 km. Ils cherchent à faciliter les tâches quotidiennes pour ne pas être débordés de travail. « Tout est en herbe, mis à part 18 ha de maïs ensilage, décrit Philippe. Nous avons arrêté les cultures de vente et nous n’allons plus dans les champs. » L’ensemble des travaux est réalisé par une entreprise, excepté le fanage, l’andainage et les engrais. « Il n’y a plus d’angoisse, tout est réalisé en temps et en heure », constate-t-il. À travers leurs voyages, les deux éleveurs ont été convaincus de conserver leur modèle herbager, tout en le perfectionnant encore. Ils ont investi dans l’aménagement des pâtures pour simplifier le travail.
« Nous avons construit des « routes à vaches », explique Philippe. Ce sont des chemins de trois mètres de large où les vaches circulent facilement, en été comme en hiver, sans trop se salir. » Ces routes sont entièrement dédiées aux animaux, et les tracteurs sont exclus. Ainsi, un simple empierrement a suffi, sans décaissage ni enrobé.
Rénover les clôtures
Les clôtures ont également été rénovées. Philippe a investi près de 5 000 euros. Il s’est inspiré de la technologie anglaise « high tensile » (haute tension). De gros poteaux sont installés à chaque angle des parcelles et les fils d’acier sont tirés par un tendeur (voir photo). Le but est de ne plus avoir à s’inquiéter de la fuite des vaches ni des réparations. L’accès à l’eau a également été amélioré. « Plus aucune tonne n’est déplacée », se félicite Philippe. Il a installé un réseau d’eau souterrain, avec 1 km de tuyau, pour positionner un point d’eau par paddock. Mis à part le forage, il a tout réalisé lui-même. L’investissement total est de 12 000 €. « Nous nous sommes libérés des préoccupations d’abreuvement », confirme Maryline.
Côté alimentation, les rations sont simplifiées au maximum. Les vaches bénéficient de 25 ha de pâturage, quasiment toute l’année. Dès que la hauteur d’herbe est suffisante, le silo est fermé, souvent autour du 15 avril jusqu’à début septembre. En hiver, la ration est composée aux deux tiers de maïs ensilage équilibré avec du soja, complétés par un tiers d’herbe enrubannée et de foin. Ainsi, le coût alimentaire s’élève à 65 €/1 000 l en 2015. Mais les éleveurs ne font pas de concession sur la qualité. « Nous privilégions l’herbe fraîche. Le parcellaire est divisé en 25 paddocks, et l’avancée se fait au fil avant matin et soir. »
Depuis 2009 et leur retour d’Angleterre, les éleveurs ont choisi le croisement trois voies : jersiaise, rouge suédoise et prim’holstein néozélandaise. Il permet d’obtenir des vaches plus rustiques, davantage adaptées au pâturage. Les éleveurs apprécient l’aisance au vêlage et la meilleure santé globale du troupeau. Les dépenses vétérinaires sont de seulement 5 €/1 000 l. «Avec le croisement, nos animaux vieillissent mieux », constate Maryline. Le renouvellement est passé de 26 génisses en 2015 à 16 cette année.
Vêlage d’automne
Les éleveurs pratiquent également le vêlage groupé. Les inséminations sont réalisées à la même période et les génisses sont élevées par lot. Avec un vêlage d’automne, la période de tarissement correspond à la période estivale de juillet-août. Ainsi, le moment où l’herbe est moins disponible est synchronisé avec celui où les besoins alimentaires sont plus faibles. Le vêlage groupé permet une gestion facilitée des veaux : ils sont élevés en case collective et nourris au bac à tétines. Philippe a mis en place une pompe qui amène le lait directement à la nurserie par un tuyau. « Tous les vêlages concentrés sur quatre mois, ce n’est pas de tout repos », concède toutefois Maryline. Mais après le sevrage, les génisses sont envoyées sur le site secondaire. Elles y demeurent pendant deux ans. Lorsqu’elles sont en bâtiment, Philippe passe deux ou trois fois par semaine pour remplir les râteliers d’enrubanné et de foin. À la belle saison, elles sont au pâturage. Philippe vient uniquement une à deux fois par semaine pour les changer de paddock. Pour la première insémination, pas d’embarras non plus. Les génisses sont mises à la reproduction avec de jeunes taureaux de l’élevage.
La monotraite comme prochain niveau de simplification ? Philippe aimerait bien. Reste à convaincre Marylise, qui craint pour la qualité du lait.