«En 2014, mes stocks d’herbe ont explosé dès la première année de la mise en place du pâturage tournant Herby, se souvient Bernard Métais. À la tête de 350 brebis vendéennes à Vasles, dans les Deux-Sèvres, il a même vendu du fourrage cette année-là. Les conditions météo favorables ont sûrement contribué à atteindre les records de production fourragère pour cette première année. Les mesures effectuées en 2015 sur une de ses parcelles, dans le cadre d’une étude (projet Life +) portée par sa coopérative (Caveb) et financée par des fonds européens, ont atteint 12,6 t de MS/ha. Les années suivantes, les rendements étaient plus modestes : entre 7,8 t de MS/ha en 2017 et 9,8 t de MS/ha en 2016. Le résultat de 2018, qui a marqué les esprits pour la longueur de sa sécheresse, se situe entre les deux avec 8,4 t de MS/ha.
S’adapter à chaque tour
« En 2018, à la différence des autres années, la production s’est faite quasi exclusivement au printemps », constate Alice Poilane, de la Caveb. Sur les huit passages d’animaux, sept ont eu lieu entre le 13 février et le 26 juin. Le dernier n’a pu être effectué que fin novembre.
« La gestion est différente tous les ans, ajoute Bernard. Je m’adapte sans cesse à la pousse de l’herbe. Dans tous les cas, mes animaux ne restent jamais plus de trois jours sur le même paddock (lire l’encadré ci-dessous) ».
Avec le pâturage tournant Herby, Bernard a redécoupé l’ensemble de son exploitation en paddocks d’environ 0,5 ha. « Cela correspond aux besoins d’un lot de 100 brebis suitées pendant une journée, explique l’agriculteur. Pour un lot d’agnelles moins nombreuses avec des besoins plus limités, il s’adapte en allongeant le temps de présence, sans jamais dépasser la limite de trois jours.
Le redécoupage a consisté à installer deux fils de clôture électrique « High Tensile », à 70 cm pour le plus haut. « J’utilise des piquets en fibre de verre que j’enlève lorsque je renouvelle la prairie, tous les sept à huit ans », indique Bernard. Pendant la saison de pâturage, un passage de rotofil est nécessaire afin que l’électricité circule efficacement. « J’ai dû acheter également 6 postes de clôture, ajoute-t-il. Des tuyaux pour acheminer l’eau ont également été posés. Au total, l’exploitant estime que l’investissement n’a pas dépassé 100 €/ha.
« Herby se met en place sans bouleverser la conduite initiale, souligne Alice Poilane. » Le redécoupage des parcelles peut s’organiser en fonction des lots existants. Bernard, de son côté, continue de consigner tous les déplacements des animaux (avec la date et l’heure) dans un cahier qui récapitule l’ensemble des parcelles et de leurs subdivisions. « Si j’observe que la pousse est trop rapide, je réserve un paddock pour récolter du foin, même si la parcelle est petite, déclare Bernard. C’est la contrainte de la technique. »
Ainsi, sur l’une des parcelles inscrites dans le projet Life, il réalise sept à neuf passages par saison de pâturage (entre 2014 et 2018), soit deux à trois de plus que la moyenne des 135 éleveurs suivis. Le temps de retour sur l’une d’elles est variable de vingt à cent trente jours. « Au printemps, je veille à sortir tôt (à 2,5 feuilles) pour ne pas être dépassé », précise Bernard.
« L’analyse des prélèvements réalisés à chaque tour sur cette même parcelle montre que la ressource est riche en énergie et en PDI au fil de l’année (voir le tableau ci-dessus). « Le stade trois feuilles de la méthode Herby n’est pas lié à une hauteur d’herbe évaluée à l’herbomètre. Nous avons mesuré un écart de 6 à 15 cm. Ce stade garantit, en revanche, une qualité constante, assure Alice Poilane.
marie-france malterre
Lire aussi La France agricole du 9 mars 2018, en page 28.