Lorsqu’il s’est installé, en 2013, sur l’exploitation de ses parents, Samuel De Smet a souhaité créer un nouvel atelier de culture et s’est tourné vers la production de safran. Cette épice lui a permis d’apporter de la valeur ajoutée à son exploitation sans pour autant nécessiter de surface supplémentaire. Cette culture est venue diversifier un assolement déjà atypique pour la région : en plus des grandes cultures (colza, blé, orge), les parents de Samuel De Smet se sont lancés dans le tabac pour compenser la fermeture de leur atelier porcin. Du lin est également historiquement cultivé sur l’exploitation.
« Le gros avantage de produire à la fois des grandes cultures et des cultures plus spécialisées, c’est le lissage du revenu, explique Samuel De Smet. Globalement le résultat est invariable suivant les années. » La diversité des productions végétales permet en effet à l’EARL de gérer les risques liés à chacune d’entre elles, qu’ils soient d’ordre climatique ou liés aux fluctuations des marchés. Ce fut le cas en 2016, par exemple, année où les récoltes en grandes cultures ont été particulièrement touchées par une météo capricieuse. « Contrairement à un bon nombre d’agriculteurs, nous avons fini l’année dans le vert », se souvient-il. Elle fut atypique, mais pas catastrophique économiquement. « 2016 fut une très bonne année pour le tabac, et s’avéra correcte pour le lin et l’atelier de multiplication de semences. L’atelier safran a commencé également à être intéressant », explique l’exploitant.
Apports réguliers de trésorerie
Autre avantage : les différentes cultures ont chacune leurs spécificités de commercialisation, ce qui permet des entrées d’argent régulières. Par exemple, le tabac bénéficie d’une avance de trésorerie de la part de la coopérative : en décembre, 75 à 80 % du prix est déjà payé, alors que la vente du tabac par la coopérative n’a pas encore démarré. En revanche pour le lin, c’est le contraire : le solde de la récolte 2017 sera reçu en septembre 2018. Alors que certains agriculteurs se voient dans l’obligation de vendre leurs récoltes de céréales pour payer leurs charges, l’EARL De Smet peut se permettre d’attendre un peu pour vendre, malgré des dépenses élevées (main-d’œuvre, gaz pour le séchage du tabac…). En plus d’une trésorerie en bonne santé, l’exploitation dispose en effet d’une capacité de stockage qui lui permet de stocker tout son blé.
Des charges de travail importantes
La multiplication des productions n’est cependant pas de tout repos. Le tabac et le safran sont des cultures particulièrement gourmandes en main-d’œuvre. À titre de comparaison, un hectare de tabac demande 300 à 350 heures de travail du semis à l’expédition, contre 10 à 15 pour le blé. Pour le safran, cela monte à 600 heures, hors conditionnement. La charge est d’autant plus importante que les récoltes (en été pour le tabac, en octobre pour le safran), qui représentent des pics de travail, se chevauchent avec la moisson et les semis. « Mais on y arrive », sourit Samuel De Smet. La gestion des saisonniers réclame également de l’organisation et de la réactivité pour que les récoltes commencent au bon moment. Sur l’année, l’emploi de saisonniers représente un peu plus d’un UTH.
Activité commerciale
« Pour le safran, ce n’est pas la partie production qui est la plus compliquée », souligne Samuel De Smet. Pour cette culture, il n’y a pas de filière organisée, contrairement aux autres plantations. L’EARL maîtrise tout : production, transformation, vente. « Le gros avantage, c’est que l’ensemble de la marge nous revient. Mais la commercialisation demande beaucoup de travail ». Démarchage commercial auprès de restaurateurs et boulangers, salons, marchés, fête du safran sur l’exploitation… L’EARL multiplie les démarches pour assurer un débouché à la production. Des activités certes chronophages, mais nécessaires à la bonne réalisation des ventes. « On peut facilement se focaliser sur le prix au gramme ou au kilo du safran, mais s’il n’est pas vendu, il ne vaut rien ! » L’agriculteur se souvient que les deux ou trois premières années ont été assez difficiles. L’atelier a désormais trouvé son rythme de croisière. Le travail ne manque pas, mais les 145 ha de l’EARL font vivre deux foyers.