Avant qu’ils ne reprennent l’exploitation, leur père utilisait déjà une bineuse pour désherber l’interrang des maïs. Les deux frères Dufréchou, Guillaume et Maxime, souhaitent poursuivre la limitation de l’utilisation d’herbicides en réduisant ou supprimant les herbicides de prélevée ou postlevée précoce, et en se reposant davantage sur des interventions de désherbage mécanique. Leurs raisons ? « Parce qu’on est les premiers dans la nature, on veut en prendre soin, et puis c’est aussi pour réduire les coûts à l’hectare liés à l’achat des herbicides », indique Guillaume Dufréchou. Leur sol, sable noir « idéal pour le binage », explique en partie ces choix. En 2012, ils investissent dans une bineuse à 8 rangs avec doigts Kress et dans un système de guidage par satellite en temps réel (GPS RTK). La stratégie est mise en place sur une parcelle de 13 ha « en priorité, précise Guillaume Dufréchou, mais nous utilisons aussi la bineuse avec doigts Kress sur le reste des maïs ». Cette parcelle fait partie du réseau Dephy Ecophyto et sert pour l’acquisition de référence par la chambre d’agriculture.

Du soin et de la précision

Sur la parcelle « test », après un semis début avril, la première intervention de binage (rang et interrang) a lieu au stade 2-3 feuilles. Elle sert à détruire les premières levées d’adventices, « et aussi à enfouir la potasse », apportée en combiné, note Guillaume Dufréchou. Cette intervention demande de l’attention car « plus le maïs est petit, plus le passage est délicat, poursuit l’agriculteur. Il ne faut pas avancer trop vite, on est à 4-5 km/h ». Le passage des doigts Kress se fait jusqu’au stade 6-7 feuilles. « Après, on passe en ne binant que l’interrang, quand on apporte l’azote liquide, en deux fois. » Avant le stade de la « limite du passage tracteur », les chénopodes, digitaires, daturas et pourpiers qui auraient poussé sur le rang sont contrôlés par une application d’herbicide localisée sur le rang.

Sur le reste des parcelles de maïs de l’exploitation, le programme de désherbage inclut une application en plein d’un herbicide postlevée au stade 2-4 feuilles, suivie d’un binage (rang + interrang). Au stade 5-7 feuilles, un rattrapage est réalisé en plein, et l’interrang est biné au moment de l’apport d’azote, comme sur la parcelle « test ». L’utilisation de la bineuse à doigts Kress permet de retarder le rattrapage chimique, voire de ne pas en faire, pour les années ou la pression adventice est faible.

Sur sol sec seulement

Sans herbicide de postlevée précoce en plein, la stratégie est plus risquée, car elle est davantage dépendante de la météo. « Le binage fait un bon travail, mais il faut que le sol soit sec, indique Guillaume Dufréchou. S’il pleut on ne peut pas passer. » Et si, entre-temps, les adventices se développent trop, l’efficacité du binage n’est pas garantie.

Dans ces premières années de mise en œuvre, il est arrivé que les adventices prennent le dessus… « Ça a donné des petits épis. » Pour éviter un salissement des parcelles, si les conditions météo ne permettent pas de passer avec la bineuse, l’application de l’herbicide au stade de la limite du passage tracteur peut être réalisée en plein plutôt qu’en localisé, ce qui permet de sécuriser le rendement et aussi d’intervenir plus rapidement qu’avec l’outil à 8 rangs. Depuis 2012, à l’exception d’une mauvaise année, les rendements atteints sur l’exploitation sont un peu en dessous de la moyenne de la zone, qui se situe autour de 125 q/ha. Les coûts liés aux herbicides sont, eux, diminués de 30 % sur la parcelle test par rapport au reste des maïs (voir l’infographie).

L’indice de fréquence des traitements (IFT) des herbicides a fortement diminué lors des quatre premières années d’utilisation de la bineuse avec doigts Kress. Sur la parcelle test, il baisse de 49 % par rapport au reste des maïs. Ceux-ci ont déjà un IFT herbicides plus faible que la moyenne régionale, « qui est à 1,7 », précise Vincent Mancini, de la chambre d’agriculture des Landes. Par rapport à cet objectif, l’investissement est donc payant.

Côté technique, l’apprentissage a aussi un coût. Plutôt en temps de travail cette fois. Le passage des doigts Kress nécessite une grande précision, et même si le guidage GPS aide, son réglage a pu être lourd. Sur leur bineuse, ils sont reliés sur la poutre, et pas sur les éléments. Ils ne s’adaptent donc pas forcément aux irrégularités du terrain et doivent être réglés un à un, ce qui prend du temps pour trouver les ajustements adéquats. Guillaume Dufréchou considère que « pour être plus efficace, il faudrait que les constructeurs se rapprochent des utilisateurs et travaillent ensemble sur l’utilisation et la construction des outils ».