«Le taux de mortalité de mes agneaux est passé de près de 30 à moins de 15 %, en partie grâce à l’apport d’un aliment minéral vitaminé », assure Jean-Paul Rivaud. À la tête de 410 brebis et 16 vaches allaitantes à Étagnac, en Charente, l’exploitant a raisonné la distribution des minéraux à ses brebis en 2012, à la suite de discussions avec une amie éleveuse. « Dès l’année suivante, j’ai vendu plus de 60 agneaux de plus, ajoute-t-il. Les vitesses de croissance se sont améliorées. J’ai dépensé moins pour les traitements, car les agneaux étaient moins malades. Bref, mon EBE a grimpé en flèche. »

Les carences minérales des troupeaux de la zone sont dues aux sols acides de Charente limousine, déficients en sélénium. Or, cet élément joue un rôle fondamental pour la défense immunitaire et dans la qualité du colostrum.

Vigueur à la naissance

« Les agneaux des brebis carencées sont moins vigoureux à la naissance, indique Philippe Dubois, vétérinaire au groupement de défense sanitaire (GDS) de Charente. Ils ont donc d’autant plus de mal à téter la quantité optimale de colostrum. Il est impossible de compenser le déficit immunitaire par des injections de sélénium. »

Pour mieux cerner l’état de ses animaux, Jean-Paul a réalisé, en début d’année, le profil métabolique de trois brebis et deux agnelles. « Malgré les apports et la cure en minéraux peu de temps avant le prélèvement, les animaux sont toujours fortement carencés », indique-t-il. Le niveau mesuré, qui reflète l’état de l’animal au cours des six derniers mois, est près de dix fois inférieur aux recommandations. « J’envisage d’acheter un minéral plus adapté aux besoins de mes animaux », explique Jean-Paul. Il ne contiendra pas de fer, à la différence de celui qu’il utilisait (lire l’encadré).

L’équilibre de la ration de brebis en énergie et protéines est, par ailleurs, primordial pour la santé des agneaux. Surtout en fin de gestation. « Il ne faut pas trop limiter la concentration en protéines à ce stade, souligne Philippe Dubois. Les besoins du foetus sont importants et l’apport de protéines limite l’acidose. » Ce risque est accru en fin de gestation, en raison d’un apport en céréales nécessaire pour couvrir les besoins en UF (unités fourragères) de la brebis. « La distribution en plusieurs fois limite le risque », insiste Philippe Dubois. Dans le cas d’une fabrication à la ferme, comme chez Jean-Paul, le vétérinaire conseille de réserver une part au maïs, moins acidogène. Jean-Paul espère pouvoir gagner quelques agneaux grâce à sa politique de réforme. En notant tous les événements de l’élevage, dans le logiciel de suivi de troupeau, il est plus facile de repérer les brebis qui ont des mammites, ou celles qui mettent bas deux agneaux, sans jamais n’en sevrer aucun. « J’essaie d’éliminer ces animaux rapidement, explique-t-il. Mon salarié, qui travaille aussi chez d’autres voisins, a du recul et un œil aguerri pour m’aider à repérer les brebis en perte de vitesse. »

Suivi des pertes

Reste que les origines des pertes peuvent être nombreuses. Il est possible que l’ouverture du faîtage ait eu un impact sur l’ambiance dans le bâtiment. Le bilan suivant l’âge (mort-nés, morts à moins de 20 jours et morts à plus de 20 jours) est un outil précieux pour mieux cerner les causes de mortalité. En 2015, par exemple, celle des agneaux de plus de 20 jours frôlait 10 %, contre 2 à 4 % les autres années. « L’aliment fermier que je distribuais dès la naissance était probablement trop riche en amidon et pas assez en fibres pour une bonne préparation de la panse, explique Jean-Paul. Je réalise le mélange moi-même, avec du triticale, du maïs et un complémentaire azoté. Je vais distribuer cet aliment à partir de 1 mois seulement et acheter un aliment premier âge moins acidogène pour le démarrage. Je compte progresser encore, car nous ne sommes jamais à l’abri d’un accident sanitaire ! »