Les emplois dans les start-ups sont à 92 % des CDI… qui prennent fin, pour la majorité, au bout de trois ans. « Croître ou mourir » fait partie intégrante de la culture des jeunes pousses : quand 80 % échouent, 20 % survivent et connaissent un essor durable, voire considérable. Qui sera le futur Facebook ou Amazon parmi les Agtech ?

Boule de cristal

Débuté seulement en 2014, le phénomène est trop récent pour lui imaginer un futur. Parmi la centaine de jeunes entreprises qui réinventent aujourd’hui l’agriculture à l’aide de technologies, aucune n’est en mesure de savoir si elle existera demain.

Une grosse partie des start-ups meurent en général avant leur première levée de fonds. Parce qu’elles n’ont pas créé assez de valeur, sont restées à trois-quatre collaborateurs ou n’ont tout simplement pas trouvé leur marché, elles s’éteignent à la première étape. D’autres, avec de meilleurs chiffres, passent ce premier tour de financement mais peuvent aussi s’effondrer : le taux de déperdition, à chaque escale, est très important.

Cependant, par rapport à d’autres secteurs, les acteurs de l’Agtech connaissent assez bien leur marché, les besoins des agriculteurs comme ceux des acteurs traditionnels. Difficile ainsi de s’y lancer par hasard. Preuve en est le nombre important de fils d’agriculteurs parmi les fondateurs. Sur la ligne de départ, les spécificités du marché agricole écrèment par avance les initiatives, limitant dans le même temps la casse à l’arrivée.

Depuis les capteurs connectés aux champs (Weenat, Sencrop, Karnott, Nexxtep…) jusqu’au financement participatif (Miimosa…), en passant par les places de marché en ligne (Agriconomie, meshectares.com, larécolte.fr...), les outils d’aide à la commercialisation (Piloter sa ferme, comparateuragricole.com...), les logiciels de gestion (Ekylibre…), les plates-formes de mise en relation pour des formations (Agrifind), pour échanger ses parcelles, louer son matériel (Wefarmup, votremachine.com...) ou pour favoriser les circuits courts (La Ruche qui dit oui…) : les projets abondent dans tous les sens. Et de plus en plus de start-ups entrent en concurrence. C’est le cas dans l’e-commerce agricole. Rien n’empêche que toutes se maintiennent si le marché le permet. Rien n’empêche non plus que toutes disparaissent : si une grosse coopérative ou un gros négociant étaient amenés à lancer une grande plate-forme pour faire de la vente directe sur le web, le sort de celles qui n’auront pas su se diversifier pourrait se régler en un an.

Deux ou trois acteurs subsisteraient néanmoins par catégorie. Et si ce n’était pas le cas, ces nouveaux moyens de vente ou modes de consommation se maintendraient, quelle que soit la destinée des jeunes pousses.

Le buzz de la ferme digitale

Pour l’heure, il est encore trop tôt pour voir les premiers acteurs de l’Agtech tomber. Le financement arrive encore dans les start-ups via des fonds. Des coopératives commencent aussi à s’y intéresser. Dans les deux ans à venir, une dizaine devraient voir le jour, et celles déjà en place continuer à se diversifier.

L’engouement pour La Ferme digitale, qui réunit treize start-ups de l’agriculture avec deux tours de financement à leur compteur, témoigne aussi de cette effervescence : la communauté a reçu une trentaine de demandes d’entreprises souhaitant l’intégrer. Fondée en 2015, elle ambitionne de créer des synergies entre start-ups, agriculteurs, grands groupes et instituts de recherche pour inventer et mettre en avant l’agriculture de demain. Des projets se construisent en son sein. Agriconomie, Piloter sa ferme, Ekylibre (logiciel de gestion) et Airinov (drone) montent actuellement un projet en commun. La Ferme digitale organisera par ailleurs le 1er juin, à Paris, « LFday », le premier évènement 100 % Agtech qui réunira 50 entreprises innovantes européennes.

Enfin, s’il est difficile de prévoir l’avenir de ces start-ups, les acteurs traditionnels ne se posent plus la question de savoir s’il faut aller sur le digital mais comment y aller. Car aujourd’hui, tout le monde a compris que c’était l’une des voies à prendre, même en avançant à vue…