Lorsque Sylvia David fait un tour dans les salles de maternité de son élevage de porc de 250 truies à Loscouët-sur-Meu (Côtes-d’Armor), rien n’échappe à son œil avisé. Elle repère un porcelet diarrhéique et lui pose une aiguille auprès du nombril. Le geste est net, précis, rapide. Avant la mise bas, elle réalise un « recentrage énergétique » sur certaines truies en apposant une aiguille sur la pointe du front et une sur la ligne de dos entre les pointes des hanches. Elle pratique aussi l’acupuncture sur son troupeau de 80 vaches laitières prim’holsteins qu’elle élève en parallèle avec son mari et un associé.

« Sur l’élevage de porcs, outre les diarrhées récurrentes, j’avais des problèmes importants de congestion mammaire sur les truies empêchant l’écoulement du lait. Je passais mon temps à faire des injections d’ocytocine. J’étais arrivée au bout du système », raconte l’agricultrice.

À la recherche de solutions alternatives, elle s’inscrit en 2018 dans une formation en acupuncture proposée par le Ceta 35 animée par Nayla Cherino, une vétérinaire spécialisée dans les médecines naturelles. À l’époque, la formation était proposée pour les bovins mais très vite Sylvia l’a appliquée sur ses porcs.

Préparation à la mise bas

L’éleveuse pratique l’acupuncture en préventif et en systématique sur les truies pour la préparation à la mise bas avec trois points : bascule du bassin, dilatation du col et régulation des contractions. En curatif, le triangle d’immunité (rate, rein, foie) est utilisé sur les truies et porcelets en complément des autres soins ou points nécessaires. Elle intervient aussi sur les diarrhées du porcelet et les boiteries des animaux, les montées de fièvre… « L’effet est très rapide. Si je détecte précocement une diarrhée en mettant une aiguille le matin, je vois déjà une amélioration en fin d’après-midi contre 48 heures pour un antibiotique. » Les antibiotiques sont donnés en dernière intention.

La partie en inox de l’aiguille souple est enfoncée dans la peau. (©  Isabelle Lejas)

Les résultats sont au rendez-vous. L’élevage du Moulin n’utilise plus d’hormones pour déclencher la mise bas depuis trois ans ni pour la délivrance. « J’ai conservé les hormones de synchronisation des chaleurs car j’ai besoin d’avoir le nombre de cochettes à rentrer dans les bandes », avertit la productrice. Elle n’utilise presque plus d’antibiotiques. Entre 2018 et 2024 (GTE), les frais vétérinaires sont passés de 182,5 € par truie et par an à 137 € dont 103 € de vaccins. Les performances se sont aussi améliorées passant de 12 à plus de 14 porcelets sevrés par portée en six ans. En un an, l’élevage a gagné un né vif par portée pour atteindre 17 nés vifs par portée, contre 14,9 en 2018.

« L’acupuncture fait partie des outils qui m’ont servi à progresser. Elle ne règle pas tout, ce n’est pas miraculeux. Les bases doivent être saines : respect de la biosécurité, marche en avant… », admet l’éleveuse. Elle est aussi très rigoureuse sur le protocole vaccinal. En accord avec la vétérinaire de l’élevage, l’ART (vaccin rhinite) a été arrêté. « L’acupuncture fait partie d’une stratégie de remise en question de sa conduite pour passer d’un cercle vicieux à un cercle vertueux », estime Sylvia David.