Malgré son poids démographique et économique, l’agriculture polonaise a du mal à faire valoir ses intérêts, à Varsovie comme à Bruxelles, en raison d’une représentation excessivement fragmentée et politisée.

Il n’y a pas qu’en France que les corps constitués traditionnels sont de plus en plus court-circuités. Cette année, les manifestations et blocages auxquels ont participé des milliers d’agriculteurs polonais n’ont pas été organisés par les syndicats historiques, mais par l’UWZ, une jeune « Association de producteurs de pommes de terre et de légumes ». Se voulant plus indépendante et transparente que ses aînées, elle envisage d’imiter le mouvement des gilets jaunes pour se faire entendre des pouvoirs publics.

Il est vrai qu’en Pologne, la forte politisation des organisations professionnelles peut donner l’impression à de nombreux agriculteurs que les intérêts partisans passent avant les leurs. Le réseau des chambres d’agriculture, institué en 1996 sur le modèle français, est profondément influencé par le Parti paysan (PSL), avec un rôle réduit des élections (4,34 % de participation en 2015). Cela encourage les syndicats à intervenir directement dans le champ politique, à l’exemple de « Solidarnos´c´ agriculteurs individuels », dont la présidente, Teresa Hałas, est aussi députée membre du parti au pouvoir, le PiS. De son côté, la FBZPR fédère des syndicats de petits producteurs, mais ceux-ci ont du mal à formuler des positions communes, d’autant qu’ils sont concurrencés par d’autres organisations sectorielles où siègent de grands industriels au poids beaucoup plus important.

Conscients des difficultés liées à un tel éparpillement, ces trois institutions et le ministre de l’Agriculture veulent créer un « Conseil national agricole » qui chapeauterait l’ensemble, sans toutefois démocratiser les structures. Pas sûr que cela convainque les déçus du système actuel, qui pourraient se tourner vers l’UWZ ou le nouveau parti paysan protestataire PCh.

De notre correspondant, Romain Su