Le projet législatif visant à diminuer drastiquement l’usage des pesticides dans l’Union européenne a franchi ce mardi 24 octobre 2023 une première étape au Parlement européen. Et ce, en dépit de l’hostilité de la droite, et alors que les négociations des États membres sur ce texte s’enlisent. En revanche, une déclaration symbolique distincte réclamant l’interdiction complète du glyphosate a été rejetée en commission, avant un vote des Vingt-Sept en novembre sur le sort de cet herbicide.
Augmenter les ventes de « pesticides à faible risque »
La législation sur les pesticides proposée en juin 2022 par la Commission européenne prévoit de réduire de moitié d’ici à 2030, comparativement à la période de 2015 à 2017, l’utilisation et les risques à l’échelle de l’Union européenne des produits phytosanitaires chimiques. Cet objectif contraignant a été repris dans le texte adopté ce mardi par les eurodéputés de la commission de l'environnement à 47 voix pour, 37 voix contre et deux abstentions, en élargissant la période de référence.
Ce compromis, endossé par les élus de gauche et les centristes du groupe Renew, relève à 65 % l’objectif de réduction, à même échéance, des « produits les plus dangereux », contre 50 % proposés par Bruxelles. Une cible à laquelle le PPE (droite) s’est farouchement opposé, à l’unisson des organisations agricoles majoritaires.
Afin de promouvoir l’usage de « composants de substitution », les eurodéputés réclament à la Commission européenne de fixer un objectif à l'horizon de 2030 pour l’augmentation des ventes de « pesticides à faible risque » et produits de biocontrôle, pour lesquels Bruxelles est appelé à accélérer ses procédures d’autorisation. Les élus souhaitent que chaque État adopte des objectifs nationaux en fonction des ventes annuelles de pesticides, de leur niveau de danger et de la surface agricole, charge à Bruxelles de vérifier si ces cibles sont suffisamment ambitieuses.
« Minimiser toute incidence sur la sécurité alimentaire »
Les produits phytosanitaires chimiques seraient de façon générale bannis dans les « zones sensibles » — espaces verts urbains, terrains de jeux et de sport, sentiers publics, aires protégées Natura 2000, etc. — ainsi que sur une bande tampon de cinq mètres, mais ces dispositions ont été assouplies par les eurodéputés, qui ménagent des possibilités de dérogations.
L’application des nouvelles règles sera progressive « afin de minimiser toute incidence sur la sécurité alimentaire ». Un risque martelé par le PPE, comme par l’organisation des syndicats agricoles majoritaires, le Copa-Cogeca et les États membres hostiles au texte.
Sur fond d’oppositions croissantes aux législations environnementales européennes, les ministres de l’Agriculture ne se sont toujours pas prononcés. Ils réclamaient à la Commission une nouvelle étude d’impact évaluant d’éventuelles chutes des rendements, finalement rendue cet été. Plusieurs pays, la France en tête, demandent aussi des « clauses miroirs » imposant les mêmes règles aux produits agricoles importés dans l’Union européenne.
Le texte fera désormais l’objet d’un vote en plénière par l’ensemble des eurodéputés en novembre, avant de futures négociations avec les États une fois que ceux-ci auront arrêté leur position.