Tête sur le côté, sa grosse patte affalée, l’animal de 250 kg environ, dort de tout son long le temps que le chercheur lui installe tranquillement un collier. À la fin du mois de septembre, deux ours bruns comme celui-ci ont été capturés en Espagne dans la province de Castille-et-León, non pas pour être mis en captivité mais pour se voir dotés d’un GPS afin de les géolocaliser en temps réel. Ces deux plantigrades sont venus rejoindre une cohorte de 28 autres ayant déjà été équipés d’un même émetteur depuis la mise en place en 2021 par la Communauté autonome (Junta) de Castille-et-León d’un programme de coexistence entre les ours et les zones habitées. Alors que le dernier recensement évaluait à 370 le nombre d’ours bruns dans la chaîne de montagnes cantabrique, cette population devrait aujourd’hui avoisiner les 400 animaux.

Balles en caoutchouc

Dans le cadre d’un protocole qui a été approuvé au niveau national, le programme de la Communauté autonome permet à une patrouille de gardes d’intervenir dès lors que les animaux s’approchent des zones urbaines et des lieux de culture ou d’élevage. Ces personnes (9 en tout) peuvent recourir si nécessaire à des tirs de balles en caoutchouc pour dissuader l’ours d’aller plus loin. « Jusqu’à présent, les ours auxquels nous avons appliqué ce protocole ne sont pas revenus près des villages », souligne David Cubero Bausela, chef de service des espaces naturels en précisant que cette mesure reste la plus dissuasive de toutes : « c’est plus efficace que les sons, car les ours s’habituent au bruit et au bout d’une demi-heure ils reviennent », indique-t-il.

Les autorités insistent cependant sur le fait que le signalement au travers d’un numéro (le 112) doit être fait au plus vite. « Si un ours s’est accoutumé à venir pendant des semaines dans un potager, une étable et que nous n’avons pas été prévenus en amont, cela risque d’être plus compliqué à résoudre. Les gens doivent nous appeler avant de filmer ou d’aller sur les réseaux sociaux », plaisante David Cubero Bausela. La patrouille compte également des chiens qui ont été importés des États-Unis, spécialement dressés pour poursuivre les ours au cas où cela serait nécessaire pour les faire sortir des lieux fréquentés par l’homme.

À cette mesure exceptionnelle s’en ajoutent d’autres plus classiques comme l’installation gratuite par les autorités régionales de couvres-conteneurs à l’entrée des villages ainsi que des clôtures électriques pour protéger les zones agricoles et d’élevage et les ruches. « Les attaques sur les troupeaux de chèvres ou de brebis sont ponctuelles et constituent un pourcentage relativement faible au regard des dommages causés aux ruches et à l’agriculture » poursuit cet expert en précisant que la communauté autonome indemnise les professionnels concernés s’il y a des dégradations.

Ces dernières varient en fonction de la présence suffisamment abondante ou pas de nourriture en montagne. « Cette année les dommages ont été plus élevés parce que la production de faines et de glands a été moins importante dans la nature », détaille-t-il. À ce stade, cependant l’ours, emblème local, continue de bénéficier d’un capital sympathie auprès des habitants que la région compte bien entretenir le plus longtemps.