Les résultats de la commission d’indemnisation des dommages d’ours montrent « une vraie tendance », affirme Franck Watt, du syndicat ovin de l’Ariège, qui s’inquiète de la « courbe exponentielle de la prédation » dans son département.
448 dossiers de dommages
Selon le communiqué publié jeudi par la préfecture, 448 dossiers de dommages liés au plantigrade ont été déposés en 2018 dans le département de l’Ariège, où les opposants à la présence de l’ours dans les Pyrénées sont particulièrement virulents.
Sur ce nombre, 428 ont fait l’objet d’une indemnisation. En 2017, seuls 265 dossiers avaient été déposés (soit +70 %). Depuis 2012, le nombre de dossiers déposés en préfecture oscillait entre 143 et 174.
« On va vers plus de prédation »
« Cela traduit une perte complète des services de l’État par rapport à la prédation », a accusé Franck Watt. « Évidemment qu’on va vers toujours plus de prédation si rien n’est fait ! » La Confédération paysanne avait déploré dès août un plan ours 2018-2028 « bâti sans concertation ».
Le syndicat ovin de l’Ariège dénonce lui aussi la réintroduction au début d’octobre de deux ourses slovènes dans les Pyrénées, décidée par l’ancien ministre Nicolas Hulot, « contre l’avis des professionnels ».
Une attaque en Espagne
Alors que l’une d’entre elles a attaqué une brebis pour la première fois en Espagne, le syndicat a décidé de « prendre les choses en main ». Il a déposé mercredi une requête en référé devant le tribunal administratif de Paris contre l’arrêté de réintroduction, a confié Franck Watt.
Il veut « contraindre le gouvernement à assurer une protection du troupeau, ce qui n’est pas le cas actuellement ». Du côté des associations pro-ours, l’interprétation du rapport n’est pas la même, mais la colère contre l’État est presque aussi virulente.
Divergence d’interprétation
« Le nombre de dossiers déposés ne reflète pas le nombre d’attaques d’ours, ce sont en fait des constats d’expertises », tempête Patrick Leyrissoux, porte-parole de Férus, ajoutant que les dossiers indemnisés comptabilisent aussi des animaux dont la cause de la mort est « indéterminée ».
S’il concède que « le nombre de bêtes tuées a doublé ou triplé en un an », le représentant de Férus y voit « des lacunes de protection » de la part des éleveurs ariégeois et surtout de l’État.
Il dénonce le fait que les dégâts ne soient « localisés qu’en Ariège ».
Les pro-ours pointent l’Ariège du doigt
Et de citer les chiffres de 2017 : 689 animaux indemnisés en Ariège pour 798 dans l’ensemble du massif pyrénéen, soit 86 %. Un pourcentage conforme à ceux constatés les années précédentes.
« En Ariège, il y a des troupeaux qui sont laissés complètement libres, c’est-à-dire sans moyen de protection, et des estives avec de grosses lacunes de protection », assure-t-il.
Selon lui, la France fait figure de « bonnet d’âne de l’Union européenne concernant les morts par grands prédateurs » : « Un loup ou un ours va manger 30 brebis en France, et 5 à 6 fois moins dans les autres pays européens. »
S’il accuse le milieu agricole ariégeois d’adopter « une posture de rejet des grands prédateurs », Patrick Leyrissoux incrimine surtout l’État, qui « a laissé faire » et « s’est contenté d’indemniser » sans « être proactif » dans la protection des troupeaux.
Depuis 2012, le nombre de plantigrades est passé de 22 à 44 bêtes dans la région centrale des Pyrénées, selon le rapport annuel 2017 du réseau ours brun.