«J’étais en attente depuis longtemps déjà d’un système d’ensilage qui permette de valoriser tout le maïs, et de ne plus retrouver de grains perdus dans les bouses, retrace Jean-Marie Dubois, installé depuis 2009 à La Croix-Avranchin (Manche). Je surveillais depuis quelques années l’essor du shredlage aux États-Unis, et je guettais son arrivée en France. » Le jeune éleveur a adopté cette technique d’ensilage pour la récolte des 26 ha de maïs de septembre 2016.
Le mot vient de l’anglais shred, qui signifie « déchiqueter ». L’ensileuse est équipée de rouleaux éclateurs spéciaux qui lacèrent les tiges et les feuilles de maïs dans les deux sens, et pulvérisent le grain. Les couteaux sont souvent réglés pour obtenir des morceaux longs de l’ordre de 30 mm. « Nous aboutissons à un aliment fibreux, adapté à la rumination des vaches. De plus, les surfaces d’attaque des tiges et des feuilles par les bactéries sont plus importantes, du fait du déchiquetage de parties de la plante dans les deux sens », explique Géraldine, l’épouse de Jean-Marie, installée depuis 2011.
À l’ouverture du silo, fin septembre, ils ont mis quelque temps à caler la ration de leur troupeau, constitué de 65 prim’holsteins pour environ 630 000 l de lait produit. « Nous avons divisé par trois les quantités d’enrubanné apportées. Certains éleveurs n’apportent même plus d’aliments fibreux supplémentaires. Nous avons aussi diminué les aliments composés », souligne Jean-Marie.
Pour un objectif de production à 35 kg/VL, la ration inclut désormais 45 kg de maïs shredlage, 5 kg d’enrubanné de ray-grass italien, 0,3 kg de foin, 8 kg de betterave, 2,5 kg de correcteur azoté tanné, ainsi que 3,8 kg de concentrés de production distribués au robot de traite. Le coût alimentaire a baissé de 108 à 95 €/1 000 l, malgré le surcoût lié à la technologie mise en œuvre. « Le shredlage coûte un peu plus cher, car l’ensileuse avance plus lentement dans les rangs. Le matériel est également un peu plus coûteux. Les éclateurs sont soumis à des contraintes très importantes : la plante entière passe dans une fente entre les rouleaux pas plus grosse que 1 mm. Cela nécessite l’achat de machines renforcées, et l’usure reste une interrogation », confie Jean-Marie. Ce dernier, également entrepreneur de travaux, s’est équipé de trois ensileuses en mesure de déployer cette technique.
Des taux améliorés
En parallèle à la baisse du coût alimentaire, les éleveurs ont gagné deux points de taux butyreux (42,8 g/kg sur la période hivernale) et deux points de taux protéique (34,9 g/kg) par rapport à la même période l’an passé, d’après le contrôle laitier Littoral normand. Selon ce dernier, qui s’est impliqué aux côtés des éleveurs pour évaluer la technique, d’autres campagnes seront nécessaires afin de confirmer les avantages du maïs shredlage. Il n’en reste pas moins que les premiers résultats sont très encourageants.