Tout a débuté au printemps 2020. Six riverains des communes de Fréhel et de Plévenon, dans les Côtes-d’Armor, se réunissent avec un objectif commun : aider de jeunes agriculteurs qui n’ont pas les moyens d’acheter des terres à s’installer.

GFA avec 160 apporteurs

Le petit groupe, composé en majorité de retraités, est allé à la rencontre d’agriculteurs du coin. « On a vite compris que l’aspect financier était le principal frein et qu’il fallait agir au niveau du foncier », explique Nadège Lefeuvre, l’une des initiatrices du projet. En octobre 2020, « une aubaine » se présente à eux, poursuit-elle. Une agricultrice vendait 30 hectares pour 200 000 euros, à Fréhel. En quinze jours, une centaine de riverains ont répondu à l’appel. Il a ensuite été décidé d’utiliser un groupement foncier agricole (GFA) existant, qui réunit désormais 160 apporteurs au projet.

Grâce à l’aide de la Safer notamment, mais aussi de la chambre d’agriculture, des maires et des syndicats locaux, trois porteurs de projets agricoles ont été trouvés : Damien Ernault, Mathieu Juhel et Katell Lorre, âgés de 27 à 40 ans. « Ça ne pouvait pas mieux tomber pour nous, relate Damien. Sans l’aide de ce GFA, on n’aurait pas pu investir. On ne voulait pas s’endetter pour vingt ans pour des terres. » Avec sa compagne Lucie Hos­pital, il a repris une chèvrerie en 2011. Sur les 30 hectares à louer par le GFA, ils en ont récupéré 11. Soit un tiers de surface en plus pour leur élevage.

« On se sent moins seul »

Un enthousiasme que partage Mathieu. Grâce aux 5 hectares loués au GFA, il arrive « à l’idéal de la surface ». Au démarrage, en 2017, il avait seulement 7 hec­tares pour cultiver du houblon bio. Après l’achat de 25 hectares cette année, ce fils d’agriculteurs de 27 ans et sa conjointe peuvent désormais implanter leurs cultures­ et élever leurs 200 brebis bio.

De son côté, Katell Lorre a obtenu 12 hectares. Installée en 2013 à Saint-Cast-le-Guildo, elle avait à peine 6 hectares pour cultiver du blé noir et fabriquer ses galettes de A à Z. « Je n’avais pas assez de foncier, explique-t-elle. C’était une vraie galère ! » Alors quand Nadège Lefeuvre l’a contactée pour lui expliquer la démarche, Katell a fini par accepter et délocaliser le siège de sa ferme à Fréhel.

Chèvres, blé noir, houblon ou brebis bio, quels que soient leurs projets d’installation, Damien, Mathieu et Katell sont unanimes : « Aujourd’hui, on se sent moins seul ! » Cette initiative solidaire et locale semble donc avoir relevé le pari. « Et qui sait, ajoute Nadège Lefeuvre, elle pourrait donner l’idée à d’autres. » O. Dieulot