La fête de la cerise de Saint-Hilaire-Saint-Mesmin (Loiret), qui réunit habituellement des milliers de personnes, n’aura pas lieu cette année. La faute à la situation sanitaire, bien sûr. Mais Nicolas Gidoin, arboriculteur dans cette commune avec 16,5 hectares de vergers, admet que « ça aurait été déprimant une fête de la cerise sans cerise ». Sur les 120 hectares de cerisiers au sud de l’Orléanais, 80 à 90 % ont gelé dans la nuit du 6 au 7 avril. Ce gel dévastateur à - 7 °C et le mois de fraîcheur qui a suivi ont mis les vergers à blanc.
Le Loiret est un des secteurs les plus touchés en France. « Il n’y a aucune Burlat. Pour les variétés les plus tardives, on a vu les fruits se former, mais le stade végétatif a été tellement long que cela a entraîné une chute physiologique lors de la pousse », indique Betty Fidalgo, conseillère en arboriculture à la chambre d’agriculture. Résultat : les rares cerises encore dans les arbres aujourd’hui sont attaquées par les pigeons et les mouches.
Peu de travail saisonnier
Sous son hangar, Nicolas Gidoin trie quand même quelques bigarreaux d’un beau calibre. Il fait partie des 10 % d’agriculteurs du secteur qui ont mis en place, il y a trois ans, des filets et des bâches. « Quand la mouche Drosophila suzukii s’est développée, j’ai décidé d’investir, explique-t-il. La conception du verger en haie fruitière coûte cinq à six fois plus cher qu’un verger traditionnel, et les protections près de 60 000 euros par hectare. Je vise des marchés de qualité. Mais comment faire pour rentabiliser ces investissements quand il n’y a pas de fruits ? C’est un challenge de produire de la cerise aujourd’hui ! » Grâce aux bâches et aux bougies sur 2 hectares, soit un tiers de sa surface de cerisiers, l’arboriculteur a réussi à sauver 20 % de son tonnage habituel.
Dans les rues de Saint-Hilaire-Saint-Mesmin, les arrêts de bus habituellement pris d’assaut par les saisonniers sont déserts. Nicolas Gidoin en a embauché quatre à la place de quinze : « Et encore, je complète avec d’autres activités. » Il prévoit aussi une faible récolte dans ses 4 hectares de poiriers.
Cette année, Nicolas devrait perdre plus de 50 % de ses revenus et réfléchit à un prêt court terme éventuel. En 2022, les arbres seront reposés. Mais si la production est abondante, les prix devraient, fatalement, rester bas.
Aude Richard