«Il y a dix ans, la tonne de drêches à 20 % de MS me revenait à 25 €. En 2018, elle a atteint un pic de 60 €. Ce n’était plus tenable », constate Dominique Streicher, producteur de lait à Hilsenheim (Bas-Rhin) et cofondateur du GIE Les Éleveurs de l’Est avec 11 collègues.
En 2019, le GIE entreprend de frapper à la porte des grands groupes. Les premiers refus ne découragent pas ses responsables. « Les brasseurs n’étaient pas conscients du décalage existant entre l’image d’acteur économique responsable qu’ils souhaitaient donner et un marché rendu spéculatif par des opérateurs voulant s’arroger un monopole de commercialisation et n’hésitant pas à transporter des drêches très loin pour créer localement une pénurie. Nous leur avons expliqué cette réalité et argumenté sur la pertinence de favoriser le circuit court et une empreinte carbone réduite », explique Jonathan Zehr, président du GIE, pour qui « le collectif permet de se réapproprier l’accès à ces coproduits ». Le brasseur Kronenbourg a été sensible à ce discours. Pour 2021, il a contractualisé 5 500 t de drêches issues de son site d’Obernai (1) avec le GIE à un tarif non divulgué. « Nous voulons participer à l’économie locale. Ce contrat a vocation à durer. Nous sommes prêts à étudier la contractualisation de volumes supplémentaires », indique Philippe Collinet, directeur de la communication de l’entreprise.
Des demandes à 40 000 t
Des disponibilités supérieures seraient les bienvenues. Car 170 détenteurs de bovins lait, mais aussi viande, localisés dans le Bas-Rhin, en Moselle, Meurthe-et-Moselle et Vosges, ont déclaré leurs besoins sur le site du groupement (leseleveursdelest.fr). À la mi-mars, ils dépassent les 40 000 t.
Le GIE a pris contact avec d’autres brasseurs. Son objectif est que l’achat groupé aboutisse à livrer des drêches dans une fourchette de prix de 38-42 €/t (rendu ferme). Il a pris des parts dans la société Drêches Franquin pour disposer d’une interface juridique qui lui permet de piloter une activité, dont la gestion sur le terrain a été confiée à la société Pollen, un intervenant historique sur le marché des coproduits, spécialiste de la nutrition et du mélange de ration à la ferme. Henri Roy
(1) Cette brasserie, la plus grande d’Europe, propriété de Carslberg, produit quelque 80 000 t de drêches/an.