Comme tous les accidentés de la vie, votre voisin va passer par plusieurs phases. Il doit d’abord réaliser ce qui lui arrive et cela va jouer sur son moral, surtout s’il se rend compte qu’il ne pourra plus travailler comme avant. Il va ensuite culpabiliser, car il sait qu’il aurait sûrement pu éviter l’accident, s’il avait fait plus attention. Enfin, il va angoisser à propos de questions matérielles. Comment faire pour honorer les factures et les traites lorsque sa propre force de travail, grâce à laquelle il fait tourner l’exploitation, est anéantie ? Pourra-t-il continuer à vivre sur la ferme ? Que va devenir ce bien dont il a hérité ? Ce n’est pas seulement son travail qu’il risque de devoir quitter, mais sa vie d’agriculteur !
Dans la culture paysanne, on cache ses plaies, sa douleur et ses émotions. On ne pleure pas et on ne demande pas d’aide. Mais vous pouvez être là, juste présent pour écouter cet ami, au cas où il aurait envie de se confier. À cause de la fatigue ou des traitements qui l’empêchent d’avoir les idées claires, il aura sûrement besoin d’un coup de main pour les démarches administratives, toujours compliquées. Proposez-lui de contacter une assistante sociale ou une association d’aide à domicile. S’il vit seul, n’hésitez pas à « forcer sa porte » pour lui apporter des repas ou du linge propre. S’il est en couple, n’oubliez pas de soutenir aussi son conjoint, qui passe sûrement des moments difficiles.
Ne le plaignez surtout pas, cela pourrait atteindre son honneur. En revanche, vous pouvez être présent pour vous occuper de ses bêtes, du potager, des cultures…, comme si c’était naturel, et lui dire qu’aider vous fait vraiment plaisir.
Afin de ne pas vous alarmer, il peut aussi avoir tendance à mentir et dire qu’il se débrouille très bien tout seul. Restez vigilant et attentif aux signes indicateurs d’une possible dépression. S’il ne vient plus boire l’apéritif ou jouer aux cartes, s’il vous dit qu’il dort mal, si vous remarquez qu’il grossit ou maigrit beaucoup, s’il a repris le travail, mais le fait « comme un robot », il faut s’inquiéter. N’hésitez pas à en parler à ses proches, pour alerter le médecin.