« Mon cher Macron, ouvrez un petit peu votre cœur », a lancé le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva lors d’une conférence de presse à l’Élysée ce jeudi 5 juin 2025. L’accord entre l’Union européenne et le Mercosur « serait la meilleure réponse que nos régions puissent apporter face au contexte incertain créé par le retour de l’unilatéralisme et du protectionnisme tarifaire », a-t-il ajouté, sur fond de surtaxes douanières imposées partout dans le monde par le président américain Donald Trump.
« Je vais assumer la présidence du Mercosur […] pendant un mandat de six mois. Et je voudrais vous dire une chose : je ne vais pas laisser la présidence de Mercosur sans un accord avec l’Union européenne », a-t-il insisté, avant de se dire « optimiste » sur une issue positive.
La France contre cet accord dans sa forme actuelle
Cet accord de libre-échange avec l’Argentine, le Brésil, l’Uruguay et le Paraguay doit permettre à l’Union européenne d’exporter notamment plus de voitures, de machines et de spiritueux, en échange de l’entrée de viande, sucre, riz, miel ou soja sud-américains. Paris s’oppose à cet accord dans sa forme actuelle, contrairement à d’autres pays européens comme l’Allemagne ou l’Espagne.
« Cet accord, dans le moment stratégique que nous vivons, il est bon pour beaucoup de secteurs, mais il fait porter un risque pour l’agriculture des pays européens », a répondu Emmanuel Macron, alors que des députés français avaient réuni la veille plusieurs filières agricoles à l’Assemblée pour réaffirmer leur opposition à l’accord.
Il s’agit de la première visite d’État en France d’un président brésilien depuis 2012. Elle intervient à quelques mois de la COP30 organisée par le Brésil en novembre. Les deux présidents, qui entretiennent des relations chaleureuses malgré leurs différends, devaient partager un déjeuner de travail, puis un dîner d’État dans la soirée.
La visite de Luiz Inácio Lula, qui avait lui-même accueilli son homologue français en mars 2024, va permettre de signer une série d’accords de coopération dans les domaines de l’environnement, la technologie, la défense, l’énergie et la santé.
Crises internationales
Dans le contexte mondial mouvementé, marqué notamment par les surtaxes douanières américaines ainsi que les guerres en Ukraine et au Proche-Orient, « il est d’autant plus important de retrouver des convergences avec le Brésil, un grand État émergent », qui assure cette année la présidence tournante du bloc de pays émergents des Brics, a souligné l’Élysée.
La France compte notamment sur la mobilisation du Brésil, qui a reconnu l’État palestinien en 2010, pour peser sur l’issue de la conférence organisée par la France et l’Arabie saoudite à l’ONU mi-juin, visant à redonner un élan à une solution politique au conflit israélo-palestinien.
Concernant l’Ukraine, les présidents brésilien et français ont campé sur leurs positions divergentes, alors que Brasilia continue d’entretenir de bonnes relations avec la Russie et observe une attitude de neutralité vis-à-vis de la guerre en Ukraine.
« Il y a un agresseur, c’est la Russie. Il y a un agressé qui est l’Ukraine. Nous voulons tous la paix, mais on ne peut pas traiter les deux belligérants de manière équidistante », a déclaré le président français, en relevant pour autant que le Brésil avait « un rôle très important à jouer » dans la recherche d’une solution au conflit. Luiz Inácio Lula était à Moscou le 9 mai pour les commémorations de la victoire contre l’Allemagne nazie, où il a été reçu par le président russe Vladimir Poutine.
Après sa visite à Paris, le président brésilien participera le 8 juin à un sommet économique à Monaco, puis sera à Nice le 9 avec le président Macron pour l’ouverture de la conférence de l’ONU sur les océans.