Quatre-vingts paysans cambodgiens de l’ethnie Bunong qui attaquaient le groupe français Bolloré pour avoir accaparé leurs terres ont été déboutés le vendredi 2 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Nanterre, près de Paris, selon la décision consultée par l’AFP.
Accusé de « spolier » une forêt ancestrale pour du caoutchouc
Les Bunongs, une communauté itinérante et animiste de l’est du Cambodge, reprochent à Bolloré la destruction de lieux de culte et d’arbres centenaires considérés comme des divinités.
En 2015, ils ont lancé une série d’actions de protestation contre la société Bolloré et la Compagnie du Cambodge, car elles « exercent à partir de la France le pouvoir opérationnel dans le Bousra au sein de la joint-venture Socfin-KCD dont elles dirigent et organisent au quotidien les activités ».
Ils s’estiment spoliés de leur forêt ancestrale, remplacée en 2008 par des plantations de caoutchouc. Les demandeurs affirment notamment que « leur expropriation a entraîné à la fois une perte de revenus et les a privés des moyens de subsistance ».
Un jugement « en décalage avec le droit international »
Dans le jugement rendu ce vendredi 2 juillet 2021, « il résulte qu’aucun des 80 demandeurs et intervenants volontaires ne justifie d’un droit réel ou personnel pour exploiter les terres litigieuses ».
« L’action engagée par chacun d’eux sera dès lors déclarée irrecevable pour défaut de qualité et d’intérêt à agir », précise la décision. En novembre 2019, le tribunal de Nanterre avait invité les paysans à produire des preuves établissant l’existence des terres et un document justifiant l’état civil de chacun.
« Ce jugement est stupéfiant et en décalage avec le droit international pour les peuples indigènes, car le tribunal a rejeté les documents permettant d’établir l’identité et la relation avec les terres de mes clients » a réagi auprès de l’AFP l’avocat des paysans Maître Fiodor Rilov, qui a fait appel de ce rejet devant la cour d’appel de Versailles, près de Paris.
Ils doivent payer une « indemnité de procédure » à Bolloré ainsi qu’à la société Compagnie du Cambodge de 20 000 euros, selon le jugement de vendredi.