« Les méthodologies d’évaluation ne retiennent que les impacts négatifs de l’élevage. C’est ce constat qui nous a poussés à nous interroger sur leur pertinence et à lancer cette étude », explique Pierre-Michel Rosner, directeur du CIV. Les chercheurs pointent notamment du doigt les analyses de cycle de vie (ACV), très en vogues, mais développées à l’origine par l’industrie, donc assez peu adaptées à l’évaluation de la production de matière vivante.
Ils reprochent aux méthodes actuelles de construire des indicateurs en simplifiant une réalité complexe, pour présenter une information accessible. Ils relèvent également le manque d’évaluation des méthodes, leur subjectivité ainsi que la recherche effrénée de résultats chiffrés. Thomas Turini, chef de projet pour l’environnement au CIV, prend ainsi l’exemple du rapport de la FAO chiffrant à 14,5 % la part des émissions de gaz à effet de serre liées aux productions animales dans le monde : « Avec les incertitudes liées à toutes les hypothèses qui construisent la méthode de calcul, ce chiffre pourrait tout aussi bien être 14 % ou 13 %. »
Développer une approche systémique complémentaire
Les conclusions de l’étude ne remettent pas en question l’utilité des indicateurs, mais plaident en faveur d’un développement concomitant d’une vision systémique. « Il faut accepter de perdre un peu de précision pour garder une vision globale, estime Olivier Martin, fondateur d’Agroeco-systems, il faut passer d’un calcul du bilan des pollutions, à une évaluation de la contribution systémique de l’activité agricole. »
Ce rapport est un « coup de pied dans la fourmilière scientifique », estiment les chercheurs. Des réflexions semblables existent depuis longtemps, tout autour du globe. « Des méthodes systémiques existent mais elles sont pour le moment cantonnées à des niveaux conceptuels. Il faut maintenant établir des ponts avec les niveaux applicatifs », conclut Olivier Martin.